« Napoussoum » de Sân-Naaba Kuilig Bounda : Le chef forgeron reçoit tous les honneurs de sa communauté
Intronisé le 25 mai dernier, le Sân-Naaba Kuilig Bounda a organisé son « Napoussoum » ou son « Yikinré », le 22 juin 2024 dans son palais à Saaba, dans la commune rurale de Arbollé. Il s’agit d’une tradition où le chef, une fois intronisé, devrait organiser une fête pour recevoir les honneurs de sa communauté.
Saaba, l’un des 48 villages de la commune rurale de Arbollé, province du Passoré, région du Nord du Burkina Faso, renferme des normes et des valeurs intrinsèques qui se transmettent de génération en génération. Sa tradition ancrée sur la forge étant toujours respectée, la désignation du nouveau dignitaire des forgerons doit se conformer aux normes prescrites. Lire aussi : https://kulturekibare.com/2024/05/26/arbolle-kpg-intronise-saan-naaba-kuilig-bounda-de-saaba/
En effet, l’artiste conteur, Kientega Pingdewindé Gérard dit KPG a été désigné et intronisé chef forgeron de Naaba Koom Riim Biiga de Ramessoum, le 25 mai 2024 à Arbollé. Et selon la tradition, explique-t-il en mooré « si un chef est intronisé, il devrait sept jours plus tard, recevoir les honneurs de sa communauté en particulier et des populations en général. Une démarche qui vise à informer tout le monde qu’il y a un nouveau chef ». C’est ainsi que l’homme de Kaïto…Voum, désormais Sân-Naaba Kuilig Bounda de Saaba, s’est voulu conforme à la tradition en organisant, pratiquement un mois après son intronisation, son « Napoussoum » ou encore son « Yikinré ». Parce qu’il faut rappeler que trois jours après son installation, il était aussitôt réparti en tournée de conte en France.
De retour au bercail, l’organisation du « Napoussoum » s’impose. C’est une journée spéciale de salutations des communautés au chef. Allant des personnalités administratives et coutumières aux leaders d’opinion de la société civile en passant par des artistes, le Sân-Naaba Kuilig Bounda a reçu tous les honneurs mérités.
Sous un hangar en paille, érigé à l’esplanade du palais royal, dans la cour du centre culturel Koombi, le nouveau chef forgeron de Riim Biiga de Ramessoum reçoit les salutations. Toutes les couches sociales, tour à tour s’y invitent tout en courbant l’échine. Après les civilités, un autre espace est aménagé pour servir à boire et à manger à tous.
Nous apercevons Sada Sanfo, représentant le Ministre d’Etat, ministre de la communication, de la culture, des arts et du tourisme, se présente-il. Il nous justifie sa présence dans cette cérémonie. « C’est d’abord une cérémonie significative pour le ministère en charge de la culture, car vous savez que KPG est non seulement un homme de culture, mais aussi il est ambassadeur du Mois du patrimoine burkinabè 2024. Au regard de tout cela, le ministère ne peut pas rester indifférent. C’est tout à fait normal qu’il soit présent ici pour l’accompagner », a-t-il indiqué. D’ailleurs, le conteur qui porte désormais le bonnet de Sân-Naaba, de son avis, ne fait que consolider les acquis en termes de dynamisation, de valorisation et de promotion de la culture burkinabè en général et celle des forgerons en particulier.
Aussi, l’une des figures emblématiques des arts dramatiques au Burkina Faso, la comédienne, dramaturge, metteure en scène et présidente des Récréâtrales, Odile Sankara donne ses impressions. Elle, qui a côtoyé le Sân-Naaba Kuilig Bounda en tant que collègue artiste, avoue assister à un couronnement mérité d’un riche parcours culturel et artistique. « C’est un grand artiste qui, au-delà de tous les autres artistes a pris en charge dès le départ, dans son concept artistique la question culturelle et surtout les valeurs de sa tradition, c’est-à-dire la forge d’où il vient. Je trouve que le consacrer, aujourd’hui, chef, c’est consacrer aussi le travail artistique qu’il a fait », a-t-elle confié.
Au-delà de ces témoignages, le Samand Na kansenga (ministre du Mogho Naaba Baongo), le chef de Zagtouli, le célèbre artiste chanteur Dez Altino, le web humoriste Tallco Poullo, l’activiste Souleymane Ouédraogo, le coordonnateur du Cadre 2 heures pour Kamita Lianhoué Imhotep Bayala, le metteur en scène Aristide Tarnagda, des membres du Collectif des artistes paroliers (CAP), la corporation suprême des forgerons au Burkina Faso, entre autres, ont aussi exprimé leur sympathie et leur fierté vis-à-vis du Sân-Naaba Kuilig Bounda.
Désormais, le sobriquet KPG n’est plus d’actualité. Bien qu’il reste toujours artiste, nous rappelle l’un de ses proches, c’est le titre Sân-Naaba Kuilig Bounda qui prime. La carrière artistique se poursuivra, souligne le Sân-Naaba lui-même, « je continue avec le conte et la promotion de la forge aussi, car c’est dans cette aventure, je crois modestement, qu’on m’a vu et désigné. On ne m’a pas intronisé parce que je suis vieux ou parce que j’ai des fétiches. Non. On m’a désigné à cause justement de ma promotion de la forge et des forgerons dans les quatre coins du monde entier ».
Malick SAAGA
Kulture Kibaré