DJ Arafat : L’épreuve du temps
Le 12 août 2019, la Côte d’Ivoire pleurait la disparition d’un de ses fils les plus célèbres. Figure de proue de la musique urbaine africaine, Ange Didier Houon, 33 ans, plus connu, entre autres, sous les sobriquets « Daïshikan », « Yôrôbo », « Dj Arafat » venait de tirer sa révérence des suites d’un accident de circulation. Il a déposé son micro à jamais laissant ses milliers de fans dans un chagrin excessif.
Une étendue d’hommages a coulé à flots dans les médias des quatre coins du monde et DANS les réseaux sociaux. Dans les écrits, dans les expressions vocales et sur les visages de hautes personnalités politiques, des stars mondiales du sport et autres grandes célébrités de la musique, la douleur et la peine étaient si perceptibles. Il faut se rendre à l’évidence, le « Arafat » ivoirien était une star.
« Les morts ne sont pas morts », dit-on. Et en tant qu’artiste, les œuvres de DJ Arafat demeureront, en tout cas, dans le panthéon de la musique « coupé-décalé ». Mais, il n’en demeure pas moins que sa mémoire tombe, dans quelques années, dans l’oubli.
Dans notre éditorial du 2 septembre 2019, nous l’avions clairement mentionné : « ses œuvres demeureront certes, mais il suffira qu’un autre concept naisse et que le Daïshikan tombe dans l’oubli comme son prédécesseur Douk Saga ». Lire aussi :https://kulturekibare.com/2019/09/02/arafat-dj-a-limage-dune-chine-egaree/
A peine trois (3) années après la mort du maître incontesté du coupé-décalé ivoirien, n’est-ce donc pas le constat ?
Il est évident que les réactions ne peuvent plus être les mêmes comme au soir du décès du « Daïshikan ». Mais, il aurait fallu, vu l’engouement suscité pendant les obsèques du « président de la Chine », poursuivre avec la même dynamique dans les actions en mémoire du défunt chouchouté. Pourquoi pas un musée ou un institut de formation et de recherche sur le genre musical « coupé-décalé » en mémoire à DJ Arafat ? La mobilisation de tout le pays en avait donné l’air. Nous sommes à présent, tentés de donner raison à ceux qui avaient décrié une récupération politique et intéressée sur cette mort de la star du coupé décalé. Sinon, l’autre célébrité musicale ivoirienne, Skelly décédé à 42 ans, le 25 août 2021 (après donc l’élection présidentielle ivoirienne) n’a pas eu tous les honneurs de son collègue défunt.
Bref. Force est de constater qu’une nouvelle génération est en train d’écrire une nouvelle page de la musique ivoirienne tout en faisant de l’ombre aux hits de feu Ange Didier Houon. Les Ivoiriens sont friands de buzz et de concepts musicaux. Le « Yôrô » savait si bien s’y prendre. Aujourd’hui, Ces mêmes Ivoiriens sont toujours bien servis par une nouvelle vague de concepteurs très adulés et prisés. DJ Arafat ne peut donc pas résister à l’épreuve du temps. Ange Didier a brillé, il a même régné en maître sur l’industrie musicale ivoirienne voire africaine.
Que restera-t-il de son héritage à part ses œuvres artistiques? Cette question mérite d’être sérieusement posée. Et tous les « Chinois » (fans de DJ Arafat) devraient prendre du recul, loin de l’émotion et de la passion, avant d’y répondre. Ce n’est surtout pas les frasques et autres attitudes égrillardes que ses adeptes hériteront.
L’An 3 de la mort de leur idole, selon notre confrère d’Abidjan.net, il a été déploré des scènes d’agressions et de vols sur le lieu de l’accident de l’artiste à Angré. Cette nouvelle scène nous rappelle également le vandalisme de la dépouille de DJ Arafat après son inhumation. Ces actes reflètent-ils le véritable héritage du « Daïshikan » ? L’arrogance, le vol, l’irrespect, l’indiscipline, les agressions, le m’as-tu-vu, etc. caractérisent-ils l’héritage de DJ Arafat ?
D’ailleurs, cette « Chine » a toutes les chances de jeter son dévolu sur d’autres idoles qui portent haut le flambeau de la musique ivoirienne. C’est une question de temps. Il faudra compter avec cette génération montante ivoirienne. Douk Saga, on n’en parle presque plus. DJ Arafat ne subira-t-il pas le même sort, si l’on s’en tient déjà au goût de la commémoration de sa mort cette année ?
La Rédaction
