Protection du chapeau de Saponé : Evitons de dormir sur la switch

Protection du chapeau de Saponé : Evitons de dormir sur la switch

Le mardi, 12 avril 2022, à Ouagadougou, le Burkina Faso a reçu, le certificat d’enregistrement du chapeau de Saponé en indication géographique protégée par l’Organisation africaine de la propriété intellectuelle (OAPI). Une belle prouesse pour le pays des Hommes intègres qui mérite d’être saluée sans oublier tous les acteurs impliqués grâce à qui, la protection de ce patrimoine culturel est aujourd’hui une réalité. C’est la preuve évidente que des Burkinabè et le Gouvernement, conscients, œuvrent à renforcer les dispositions culturelles, scientifiques et techniques. Mieux, ce nouvel exploit donne au Burkina Faso, l’image d’un Etat que l’on doit respecter à travers  son savoir-faire dans l’ingénierie culturelle créative.

Mais, force est de constater qu’une fois l’euphorie de la protection passée avec son battement de tambour à nous percer parfois les tympans, le plus dur ou du moins le plus important reste les jours, les mois et les années qui suivent. Malheureusement, il faut se l’avouer, notre pays est un champion de la négligence des choses précieuses. Au pays de Thomas Sankara, il y a toujours un « problème de finition », pour reprendre cette terrifiante anaphore dans la chanson du groupe « Les Séparables ». D’après ce duo, « on enterre souvent le cadavre tout en omettant ses pieds hors du caveau, et on avance en reculant ».

Il suffit de jeter un coup d’œil dans le passé pour s’en convaincre. Quel est, en effet, le sort réservé aux ruines de Loropéni (dans la province du Poni), inscrites au patrimoine mondial de l’UNESCO en 2009 ? Quid également du site de métallurgie ancienne en fer de Tiwèga (dans la province du Sanmatenga) inscrit, lui aussi, sur la liste du patrimoine mondial de l’UNESCO, en 2019 ?

Si les ruines, elles, sont continuellement menacées d’écroulement, le site de Tiwèga a vu ses fourneaux vandalisés dans le courant du mois de décembre 2019. C’est-à-dire, quelques mois seulement après son inscription au patrimoine de l’humanité. Un acte d’une extrême gravité, et qui dénote par la même occasion du manque de sérieux ou de l’inconséquence des Burkinabè dans la consolidation des acquis, en général. Allons-nous vivre le même scénario avec la protection du chapeau de Saponé ? A chacun d’épiloguer.

En ce qui concerne la préservation de ce patrimoine culturel (le chapeau de Saponé), il faut donc tirer les leçons des impairs passés, et faire ce qu’il y a de plus important.

Et pour commencer, il y a lieu de songer à réunir toutes les conditions économiques possibles en vue de la consommation et de la commercialisation du chapeau de Saponé. La protection est une chose et la commercialisation en est une autre. Ne nous voilons pas la face, si le produit protégé n’est pas consommé et commercialisé en quantité et en qualité, sa protection est nulle. La « Société coopérative des producteurs de chapeau de Saponé » devient alors un maillon indispensable dans cet engagement. Cependant, l’arbre ne doit pas cacher la forêt, car si cette structure n’est pas soutenue conséquemment par l’Etat, l’échec sera perceptible.

La protection exige impérativement l’exploitation. Il faut doter la « Société coopérative des producteurs de chapeau de Saponé » de tout ce dont elle a besoin dans l’atteinte de ses objectifs, qui est d’améliorer les conditions économiques de ses membres par la facilitation dans la production et la commercialisation du chapeau de Saponé.

Comme on le voit, il y a du pain sur la planche. Le titre de propriété intellectuelle n’est pas une banale attestation  qui doit être accrochée au mur. De même, le certificat d’enregistrement ne doit pas être une espèce d’objet décoratif.

Il revient aux ministères en charge du commerce et de l’artisanat et en charge de la culture de travailler à ce que toutes les conditions soient réunies pour un plus grand rayonnement du chapeau de Saponé et une vulgarisation inter-nationale.  Naturellement, au risque de nous répéter, cela passe nécessairement par le renforcement des capacités des premiers acteurs, c’est-à-dire les artisans de Saponé.

Aussi, ces ministères devraient sérieusement entretenir des liens étroits avec ces producteurs, artisans et tous ceux qui s’impliquent dans la promotion du chapeau de Saponé afin de faire bouger les lignes. Nous devons à tout prix éviter de dormir sur la switch.

La Rédaction

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