Trésors Humains Vivants du Burkina : De la poudre aux yeux !

Trésors Humains Vivants du Burkina : De la poudre aux yeux !

Un Trésor Humain Vivant (THV) est une personne qui possède, à un haut degré, les connaissances et les compétences nécessaires pour interpréter ou récréer des éléments spécifiques du patrimoine culturel immatériel. Un titre, selon le programme des THV de l’UNESCO (2003), doit être décerné par le Gouvernement à ces personnes considérées comme des « Trésors nationaux » de leur vivant. Car, participant au plus haut point à la préservation et à la valorisation du patrimoine culturel d’un peuple, ils représentent  des acteurs stratégiques de la transmission du savoir.

Pays culturel par excellence, le Gouvernement burkinabè, à travers le ministère de la Culture, des Arts et du Tourisme, s’inscrivant donc dans cette dynamique de reconnaissance, a élevé, le 23 décembre 2015, 17 personnes au rang de patrimoine immatériel du Burkina Faso. C’était à l’occasion de la première édition des Trésors Humains Vivants. Belle réaction de l’Etat burkinabè en se conformant à cette prescription de l’UNESCO.

Malheureusement, plus de cinq ans après, sauf erreur de notre part, nul n’a de nouveau assisté à un autre rendez-vous des THV. Ou ces 17 lauréats, dont certains sont décédés, sont-ils les seuls THV du Burkina Faso ? Ou L’initiative a-t-elle été tuée dans l’œuf ?

Quoi qu’il en soit cela n’aurait finalement pas servi à grand-chose au regard du traitement réservé aux actuels THV. Pourtant « ces lauréats méritent considération et protection. Car, en eux rayonne la culture de notre pays. Il importe maintenant de mettre à leur disposition des moyens de sorte à leur permettre de transmettre leur savoir et savoir-faire aux jeunes », avait souligné l’ancien président de la Transition, Michel Kafando. A-t-il été entendu? Rien n’est certain.

Une chose est sûre, le THV Ganta Diagbouga Tiabrimana est décédé le 24 janvier 2021 dans le plus strict anonymat. Aucun hommage national pour cet ambassadeur de la culture burkinabè, fondateur, en 1984, de la troupe de Musique traditionnelle instrumentale, décoré quatre fois, plusieurs fois reçu par le Président du Faso lors des Semaines nationales de la Culture (SNC).

Une culture menacée

Nos THV sont, faut-il avoir le courage de le dire, des laissés-pour-compte ou tout simplement abandonnés à leur sort. C’est en tout cas le sentiment du THV, l’artiste peintre et écrivain (« Le Balafon, l’or brun africain »; « L’Afrique noire, traditions »; « Tchégnounon N’Golo »), Konomba Traoré. Membre de la confrérie des Féticheurs du Konon, du Komo et du Wara et  farouche défenseur des traditions culturelles africaines, il a décrit, il y a quelques jours de cela lors d’une émission télé, en des termes peu flatteurs, la situation des THV burkinabè. A l’entendre, les THV ne disposent pas à ce jour de moyens matériels et financiers nécessaires pour vivre dignement, mais surtout pour transmettre leur savoir et leur savoir-faire. Or, n’est-ce pas là, la raison d’être de leur élévation au rang de patrimoine immatériel du Burkina Faso?

La culture est ce qui reste lorsqu’on a tout perdu, a-t-on coutume d’entendre. Vu sous cet angle, il  y a donc pire à craindre à la fois pour ces connaissances détenues par ces Hommes et pour la culture burkinabè de manière générale. Car, à cette allure, les chances pour que ces THV emportent avec eux dans la tombe un pan entier de notre culture sont élevées. Que nous restera-t-il alors après avoir perdu ces hommes et femmes ? C’est pourquoi, il est temps que le Gouvernement et le ministère en charge de la culture en particulier œuvre diligemment à mettre à leur disposition le nécessaire requis pour transmettre leurs connaissances et vivre décemment. Et cela passe nécessairement par la formalisation de la notion de « Trésor Humain Vivant » au Burkina et par la création d’un véritable cadre d’expression de ces Trésors nationaux vivants.

La Rédaction

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