Saïdou Nikièma : Le destin ahurissant d’un artiste non-voyant

Saïdou Nikièma : Le destin ahurissant d’un artiste non-voyant

Saïdou Nikiema se fait appeler Niksaid. C’est son nom d’artiste-musicien. Né le  09 octobre 1993 à Pouytenga, il est issu d’une famille polygame de treize enfants.

Saïdou a perdu la vue à l’âge de quatre (4) ans, après avoir été atteint de la rougeole. Orphelin de père et de mère, il va intégrer en 2001, l’Ecole des Jeunes Aveugles(EJA) de l’Association Burkinabé pour la Promotion des Aveugles et Malvoyants(ABPAM) à Ouagadougou grâce au parrainage  d’un couple belge.

Brillant élève, il obtint en 2007 son Certificat d’Etude Primaire (CEP) et décrocha du même coup son entrée en sixième. Il poursuivit avec les études  secondaires toujours dans la capitale et réussit au Brevet d’Etude du Premier Cycle (BEPC) en 2012, au Complexe scolaire Saint-Pierre de Kouka.

C’est en candidat libre qu’il conquit avec brillance malgré sa situation de « handicap », son premier diplôme universitaire, le  baccalauréat série (A4) en 2018, alors qu’il servait déjà depuis 2014 dans la Fonction publique, grâce au concours sur mesures nouvelles spéciales à l’intention des personnes en situation de handicap.

Saïdou Nikièma à domicile

Mais ce que bon nombre ignorent de Saïdou, ce qu’il sommeil en lui, un potentiel artistique. Depuis tout petit, il aimait interpréter les chansons d’artistes nationaux. Des célèbres artistes de l’époque à l’image de feu Black So Man, Ali Verithey, Floby ou encore Yoni et bien d’autres artistes étrangers, Tiken Jah Fakoly, Grand Corps Malade … ont largement inspiré le bonhomme.

2007 pose le pas.  Dans un concours, initié par le groupe Génération Partage, il est retenu et saisira l’occasion pour renforcer ses capacités artistiques en technique vocale.

Toujours en situation de « handicap » visuel, Niksaid n’abdique pas. Il se construit, de fil en aiguille, un mental d’acier face aux stéréotypes et finira par convaincre plus d’un par sa rage de vivre décemment.

Saïdou et sa cheffe de service, Appoline Zerbo

Aujourd’hui, agent de bureau à la Circonscription de Base (CEB) Ouaga I, Saïdou Nikièma est aussi marié. Il est père de deux enfants dont un de son sang. Repoussant son « handicap », il conduit sa vie en conciliant boulot et la musique. Il fait dans la chanson urbaine sur fond traditionnel et aussi du slam.

C’est donc avec sérieux qu’il aborde le 4e art en économisant un peu de sous pour espérer réaliser un album de six (6) titres. L’œuvre déjà enregistrée au studio de Rakis en fin 2019 reste à être finalisée avant de voir le jour. C’est la croix et la bannière financièrement. Tout compte fait, Niksaïd est optimiste. Il compte sur sa persévérance et attend l’opportunité, peut-être d’une bonne volonté pour parachever financièrement son projet musical.

Saïdou est doté d’une forte philosophie de vie  et d’un 6e sens très devéloppé. . Il ne se considère pas « handicapé ». Il tient un portable androïd qu’il maîtrise à la perfection. Il vous explore son répertoire, son whatSapp, … ressort ses titres et vous fait écouter sans aucune assistance.

Le plus émouvant est qu’il n’a pas nécessairement besoin de quelqu’un pour le guider dans son service. Il sillonne les bureaux, monte et descend les escaliers tout seul sans aucune canne. Mieux encore, il nous a conduit de son service jusqu’à son domicile avec précision, tout en restant derrière notre engin comme guide. A part les paupières fermées, Saïdou fait tout normalement.  C’est pour ça qu’il  mérite votre accompagnement sans vous être une charge.

Malick SAAGA   

 

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