Burkina Faso : Le m’as-tu-vu n’est pas du mécénat
Parvenir à produire une œuvre artistique relève parfois du miracle. Et nombreux artistes au Burkina Faso, toute branche confondue sont confrontés à cette sempiternelle question du manque de soutien. Sous d’autres cieux, cette situation est presqu’inexistante pour les acteurs culturels. Car, il existe des personnes généreuses qui acceptent accompagner (souvent à des centaines de millions) des créateurs sans aucune contrepartie.
Selon le dictionnaire, un mécène est une personne physique ou personne morale qui apporte un soutien matériel, sans contrepartie directe de la part de bénéficiaire, à une œuvre ou à une personne pour l’exercice d’activités présentant un intérêt général.
En d’autres termes, le mécénat se présente comme un dispositif permettant à une entreprise (oui, une entreprise, vous avez bien lu !) de verser un don à un autre organisme, sous forme d’aide financière ou matérielle, pour soutenir une œuvre d’intérêt général ou se porter acquéreur d’un bien culturel déclaré trésor national.
De ce qui précède, peut-on parler de manière formelle de mécénat au Burkina ? Existe-t-il des mécènes au sens propre du terme dans l’univers culturel et artistique surtout ?
Peut-être !
Mais, il est clair que le terme est ici mal utilisé ou faussement attribué à des quidams, des politiciens, des ministres, des PDG, ou autres opérateurs économiques. Parce que bon nombre d’entre eux, donnent juste pour se faire voir. Ils repèrent des larbins dits « influenceurs » sur les réseaux sociaux ou quelques acteurs culturels qui sont dans l’indigence, à qui ils remettent des enveloppes de « soutien ». Ces serfs en retour boxent en-dessous de la ceinture contre tous ceux qui opinent sur leur gourou.
Pis encore, le proxénétisme et la prostitution sont les formes les plus répandues dans le mécénat culturel burkinabè. On vous finance et on vous harcèle (lorsqu’il s’agit d’une fille) pour obtenir un rendez-vous discret et une compensation indécente. Le mécénat est assez sérieux pour l’assimiler à ces pratiques qui ont cours dans notre pays. Le m’as-tu-vu n’est pas du mécénat.
De prime abord, ce n’est pas mal en soi qu’un politicien, un ministre, un maire ou toute autre personne vienne en aide à un acteur culturel. Toutefois, cette assistance informelle, non-encadrée laisse une majorité d’acteurs culturels, qui ont aussi besoin d’aide, sur le carreau. Et ce n’est pas évident qu’un jour, ils en obtiennent étant donné le clanisme indécent qui règne dans le milieu culturel burkinabè.
Le temps est peut-être venu de porter un coup de pied dans la fourmilière en légiférant, c’est-à-dire adopter des lois qui établissent et encadrent le mécénat au Burkina Faso. Ne devient pas mécène qui veut ! Ce statut obéit, dans certains pays, à des critères bien définis.
Ailleurs évidemment, pour être éligible au mécénat, l’organisme doit présenter un ou plusieurs caractères (philanthropique, éducatif, scientifique, social, humanitaire, sportif, familial, culturel) ou concourant à la mise en valeur du patrimoine artistique ou à la diffusion de la culture.
Au Burkina Faso, ayons le courage de le dire, nous n’avons pas encore proprement dit de mécènes, mais plutôt de « généreux donateurs » entourés généralement d’un essaim de profiteurs « clanistes » jusqu’à la moelle épinière et dont le seul mode de gouvernance est de diviser pour mieux se remplir les poches. Ils se laissent reconnaître facilement dans le showbiz surtout. Et c’est la culture burkinabè qui perd au fil des ans.
C’est pourquoi, nos donateurs pourront, par exemple, mettre sur pied une structure donnée ou pourquoi pas une fondation dont la principale mission sera de soutenir le monde culturel. Ou à défaut de cela, le ministère en charge de la culture, à travers une structure étatique, devra se charger de créer une sorte de fonds ou de compte afin de recueillir les dons de particuliers, de ministres ou d’opérateurs économiques (qui se disent amoureux de la culture) afin de soutenir globalement le monde culturel burkinabè dans son ensemble sans aucune distinction ou exclusion.
La Rédaction