« Koombi Diffusion » : KPG éduque par le conte dans les espaces universitaires
« Kossyam » est une fable contemporaine qui s’inspire de l’insurrection populaire des 30 et 31 octobre 2014 au Burkina Faso. C’est une création de l’artiste conteur burkinabè, Kientega Pingdewindé Gérard dit KPG. Et c’est ce spectacle qu’il a joué les 14 et 15 janvier 2022, respectivement à l’Université Joseph Ki-Zerbo et à l’Université Thomas Sankara, dans le cadre du projet « Koombi Diffusion », financé par le Fonds de Développement Culturel et Touristique (FDCT) et l’Union Européenne (UE).
Les 30 et 31 octobre 2014 sont des dates mémorables pour le peuple burkinabè. Les Hommes intègres, on s’en souvient, avaient décidé de prendre leur destin en main, comme un seul homme en rejetant catégoriquement le projet de modification du fameux « article 37 de la Constitution » burkinabè. La forte pression des citoyens a contraint le président Blaise Compaoré à démissionner, après 27 ans de règne. Les heures qui ont précédé cette déchéance du régime furent décisives. C’est désormais de l’histoire. Les faits étant sacrés, le célèbre conteur, Kientega Pingdewindé Gérard dit KPG, s’en est inspirés pour écrire un conte théâtralisé et un livre, tous deux intitulés « Kossyam ». Dans la mise en scène, ce sont les animaux qui font revivre les instants chauds, les vives émotions, le périple de ce soulèvement populaire, le film des évènements.
Alors « Kossyam », a déjà été plusieurs fois représentée au Burkina Faso, en Afrique et en Europe. Il y a eu « Kossyam » conté, « Kossyam » dansé, mais sans tronquer le récit bien agencé. C’est ce même spectacle qui a été joué devant les étudiants de l’Université Joseph Ki-Zerbo et ceux de l’Université Thomas Sankara, pour le compte du projet « Koombi Diffusion », initié par la structure Koombi Culture en collaboration avec l’Association Koombi Solidarité. Ce projet est financé par le Fonds de Développement Culturel et Touristique (FDCT) et l’Union Européenne (UE), dans le cadre du Programme d’Appui aux Industries Créatives et à la Gouvernance de la Culture (PAIC-GC).
« Koombi Diffusion est un projet global qui intègre aussi bien la numérisation des contes que la diffusion des spectacles de contes produits par l’atelier de la forge, dans les différents quartiers. Nous avons aussi pensé qu’il était judicieux et indispensable d’intégrer les espaces universitaires. Car, nous estimons que l’art qui est produit dans les espaces artistiques a pour finalité de forger des hommes. Et dans les espaces universitaires, il y a de la pépite. C’est dans ce sens que nous avons proposé deux spectacles dans les espaces universitaires et deux autres dans les quartiers périphériques », a expliqué l’administrateur du projet « Koombi Diffusion », Teelh Loé Konaté.
Dans les deux espaces universitaires, les étudiants ont pu découvrir le contenu de la fable contemporaine « Kossyam ». Le spectacle met en scène deux musiciens (Drissa Sissoko et Sami Kimpé), un régisseur général, Issa Maïga et enfin le raconteur de l’histoire, KPG. Dans le récit, l’artiste confie qu’il y a eu 27 saisons de Soassa hyène, à la tête de « Savanayiki ». Il voulait conserver son pouvoir dans la savane contre vents et marées. Face à cette attitude dictatoriale, le crapaud, le mille-pattes et le reste des animaux dans l’histoire ont décidé de passer à l’action. Ils réussirent à empêcher Soassa hyène de modifier la constitution à sa guise pour demeurer au pouvoir.
Pour le conteur contemporain KPG, « Kossyam » est un spectacle qui non seulement raconte une histoire vécue mais aussi rend hommage aux victimes des évènements des 30 et 31 octobre 2021. « En tant que conteur, j’ai voulu écrire une fable contemporaine qui retrace l’histoire pour les générations. Je veux aussi fixer cette histoire dans la mémoire collective pour la génération future » a-t-il indiqué.
Le choix des personnages dans la peau d’animal s’est imposé de façon intelligente. Sous nos cieux, chaque animal a une représentation symbolique et KPG a voulu en tenir compte dans les attributions des rôles. « Si on prend par exemple le crapaud, il a un objectif, c’est de sauter en avant. Il ne sait pas reculer. J’ai choisi cet animal parce que j’ai vu que Smockey, Sams’K Le Jah et tous ceux qui étaient devant, pendant l’insurrection populaire, essayaient de donner l’élan, du courage aux autres qui suivaient », a-t-il laissé entendre.
Au-delà de son art, KPG a un engagement social et culturel. A la fin de chaque représentation dans ces deux espaces, il a invité les étudiants à se reconnecter avec la culture orale, la culture du conte, parce qu’il s’agit d’un moyen pour mieux éduquer et prôner le vivre ensemble.
En attendant les autres représentations, toujours dans le cadre du projet, il faut rappeler que l’initiative « Koombi Diffusion » s’investit dans la création de contenu de contes, la diffusion de spectacles, la production des capsules sur les contes, la création d’une plateforme numérique pour la diffusion, etc.
Ram OUEDRAOGO et Bernadette BATIENON (collaboratrice)
Kulture Kibaré