Kundé d’Or : De la subjectivité absolue
Reportée pour cause de Covid-19, la 20e édition des Kundé, les trophées de la musique burkinabè, se tiendra le 26 novembre prochain, suivie de l’after Kundé le 27 novembre 2021 au palais des sports de Ouaga 2000. Ces informations ont été livrées aux hommes et femmes de média, lors d’une conférence de presse organisée par le commissariat général des Kundé. Pour ce 20e rendez-vous, les artistes Amzy, Cisby, Dez Altino, Donsharp de Batoro et Imilo Lechanceux sont en lice pour l’or.
Comme à l’accoutumée, les organisateurs ont rappelé les critères de sélection des nominés. Il faut être un artiste ou un groupe musical burkinabè auteur d’au moins deux albums ou maxi dont le dernier a été sorti et diffusé entre le 1er mars 2019 et le 28 février 2021. L’album ou le maxi doit être, en outre, d’une qualité indéniable et avoir connu un succès retentissant dans les médias et autres espaces de divertissement.
Selon le commissaire général des Kundé, Salfo Soré dit Jah Press et son équipe, le « kundeable » doit avoir promu son œuvre via des actions dans les médias et hors médias. Par ailleurs, l’artiste doit également avoir fait montre d’une progression artistique et d’innovation constante dans l’organisation et la gestion de sa carrière. Aussi, en raison de la Covid-19 et donc du report, cette 20e édition compte cinq nominés.
Des kundeable (de 2019), tels que Don Sharp de Batoro et Dez Altino ont été ajoutés aux nominés de 2020. La même démarche a été appliquée aux autres catégories. En d’autres termes, ceux qui ont cartonné en 2019 vont se retrouver dans l’arène avec les artistes qui ont connu un succès médiatique retentissant l’année suivante. A moins d’un don de jugement exceptionnel ou de critères hautement « subjectifs » en cours de compétition, on se demande bien comment le jury officiel se « débrouillera » pour désigner cette année le Kundé d’Or. La promotion de l’œuvre, le succès, la progression artistique d’un artiste peuvent-ils être invariables d’une année à l’autre ? Il est clair que ce qui a marché dans une année « n » ne marche pas toujours nécessairement dans l’année «n+1 ». Il y a incontestablement un flou à ce niveau.
Il aurait fallu simplement annuler une des éditions au lieu de créer davantage de l’amalgame dans la confusion.
De prime abord, la désignation du futur Kundé d’Or va donc reposer sur de faux critères. Il est assurément triste de voir que les Kundé, devenus presqu’une institution, soit encore à un tel niveau de tâtonnements deux décennies après. Les critères de nomination doivent avoir des indicateurs et des indices mesurables sans confusion aucune. Quels sont par exemples les indicateurs d’une progression artistique (nombre de concerts? nombre de CD vendus ou d’œuvres téléchargées en streaming? …). Qu’est-ce qu’une innovation constante? Peut-on mettre dans le même sac des moutons et des loups pour les juger de la même façon? Cette innovation constante est-elle culturelle, sociale, artistique, économique, communicationnelle?… Définir au préalable la dimension, les indicateurs, les indices d’un concept (critère) s’avère judicieux.
Le jugement d’une oeuvre artistique ne peut être laissé à la merci d’un jury composé de profanes, d’amateurs, appelés personnes ressources. Les critères d’appréciation doivent être uniquement l’affaire de « professionnels » et dont les compétences ne sont entachées d’aucune once d’illégitimité. Dans toute compétition ou festival digne de ce nom, les membres du jury sont connus ou officiellement présentés.
En d’autres termes, le temps est venu pour les Kundé d’avoir aussi « de nouveaux regards pour de nouveaux défis » pour reprendre le thème du 27e FESPACO, en réformant ses critères et en présentant un autre type de jury. Dans le cas contraire, Jah Press et son équipe auront du mal à convaincre quiconque que les Kundé ne sont pas une affaire de copinage, du genre petites récompenses entre copains copines ou « bons petits ».
La Rédaction
