Littérature burkinabè : De la nécessité d’assainir la filière

Littérature burkinabè : De la nécessité d’assainir la filière

La 9e Rentrée littéraire du Faso  a eu lieu le jeudi 1er avril 2021 sous le thème « Écrire pour prévenir – Écrire pour guérirÉcrire pour tenir – Écrire pour ne pas périr». Initiée depuis 2012 par la Société des Auteurs, des Gens de l’Ecrit et des Savoirs (SAGES), cette activité vise, entre autres, à développer et promouvoir le livre et l’écrit au Burkina Faso.

La Foire internationale du livre de Ouagadougou (FILO), bien antérieure à l’élan de la SAGES, a aussi été initiée avec plus ou moins les mêmes objectifs, c’est à dire la promotion du livre et de la lecture publique au pays des Hommes intègres.

Dans la même dynamique, une loi a été adoptée en 2019 pour booster l’industrie du livre et encadrer la filière. Mais les acteurs sont toujours en attente du décret d’application.

Il existe également des différents fonds au ministère en charge de la culture et au Bureau Burkinabè du Droit d’Auteur (BBDA) pour accompagner les projets culturels, donc littéraires.

Au regard de l’importance du livre, et partant de la lecture dans la vie d’un individu ou d’un peuple, ces initiatives et les manifestations du même genre qui se déroulent au Burkina Faso sont donc à saluer à leur juste valeur.

Malheureusement. La route de l’enfer est pavée de bonnes intentions, dit-on. Dit autrement, ce serait superfétatoire que de dépenser autant d’énergie et de fonds pour promouvoir le livre et la lecture tout en banalisant les menaces qui empêchent la sphère d’effectuer un bond qualitatif.

Les défis qui se posent à notre littérature sont complexes, multiples et multiformes. Inutile de le souligner, le Burkina Faso regorge à la pelle d’écrivaines et écrivains de qualité. Cependant, il n’existe malencontreusement pas de cadre encore formel et opérationnel, notamment au niveau étatique pour promouvoir véritablement leurs œuvres au plan national et international. Un obstacle de taille  pour ces auteur(e)s déjà confrontés au désintéressement congénital des Burkinabè et des Africains en général pour la lecture.

Triste constat ! La majorité des Burkinabè abhorrent la lecture. Comment alors résoudre cette épineuse équation ? C’est à cette question lancinante que doivent répondre la FILO, la SAGES, le Groupe des Réseaux Associatifs des Acteurs du Livre (GRAAL) et les ministères en charge de la culture et de l’éducation nationale.

Hormis quelques écrivains burkinabè  qui se débrouillent comme ils peuvent pour organiser des cérémonies de dédicaces, les autres (et Dieu sait qu’ils sont les plus nombreux !) semblent faire paraitre clandestinement, et ce, sur fonds propres, leurs romans, nouvelles ou recueils de poèmes. Le public encore moins, les journalistes ne sont tout de même pas des devins pour guetter les sorties littéraires à travers une boule de cristal ! Si ces sorties « clandestines » d’œuvres ne sont pas faites sur fonds propres, il faudra espérer une subvention du MCAT ou du BBDA pour une aide à la création ou à l’édition. Toutefois, le suivi pose problème et très sélectif. Très peu d’écrivains en « herbe » sont éligibles. Un auteur de la ville Tenkodogo s’en était plaint dans les colonnes de Kulture Kibaré.

Certains écrivains manquent cruellement d’ambitions, d’imagination et de professionnalisme. Comment en sera-t-il autrement quand ils sont entourés d’agents littéraires ou d’éditeurs plus préoccupés de se remplir les poches que de booster la carrière de leurs poulains ? A ce niveau,  il importe aux autorités compétentes de donner un coup de pied dans la fourmilière tant la pagaille et le désordre sont tout simplement scandaleux. Et c’est un euphémisme. Du jour au lendemain, de simples imprimeurs se sont ainsi auto-proclamés éditeurs. C’est incroyable ! Il est temps pour le département de Elise Foniyama Ilboudo/ Thiombiano de sévir.

Car, il ne suffit pas d’imprimer un document pour se revendiquer éditeur. Editer est un métier à ne pas confondre avec l’imprimerie. Malheureusement, cela se ressent à la finition. Au final, les potentiels lecteurs retrouvent entre leurs mains des livres dont l’esthétique laisse à désirer. En plus, aucune des règles de qualité attendues d’un livre n’est parfois pas respectée, notamment la mention du numéro ISBN et du dépôt légal (qui donnent des informations précises sur le livre).

Quant  à la contrefaçon, elle a encore de beaux jours devant elle. Il urge donc, au risque de nous répéter, de siffler la fin de la récréation dans le milieu littéraire burkinabè. Car, c’est à cette  seule condition que verra le jour l’émergence d’une littérature burkinabè véritablement compétitive au plan national et international. Et l’introduction d’auteurs burkinabè dans les  programmes d’enseignement du Burkina Faso s’en trouvera facilitée.

La Rédaction

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