« Et si … » : Ousseni Dabaré nous invite à nous poser les bonnes questions

« Et si … » : Ousseni Dabaré nous invite à nous poser les bonnes questions

Danseur et chorégraphe burkinabè, Ousseni Dabaré, surnommé Esprit, a procédé, dans la soirée du 14 novembre 2020 au CDC la Termitière, Ouagadougou, à la sortie d’une résidence de création intitulée « Et si … ». Une chorégraphie qui questionne l’humanité et le monde sur mille et une choses. Pourquoi un tel regard maintenant ? Perçons son univers.   

La scène débute assez timidement. Fixé au parloir, Ousseni Dabaré, d’un air maussade fixe un regard calme et évasif. Soudain, il se met à rassembler des tubes pour bâtir un mur. Et sans avoir eu le temps de contempler son édifice, il l’embroche aussitôt avec son corps. Il tombe et se relève, tombe de nouveau et se relève de nouveau. Il se met en position de combat, frappe, attaque et défend. Tout doucement, il repositionne ses tubes dans une dimension actée. Du haut de sa tête, un fil laisse immerger un smoking dans les airs. Indifférent dans un premier temps, il finira par l’enfiler avant de continuer sa gestique.

A première vue, la scène semble incohérente, mais les mouvements et les déplacements suivent pourtant sa logique à lui. Chaque pas semble être mesuré, chaque geste semble exprimé un vécu et chaque indexation du doigt, une interaction muette. La souplesse avec laquelle le danseur manœuvre  son corps est d’une habilité inouïe. L’harmonie dans la gestuelle, l’occupation de la scène, les pas cadencés, le tout soutenu d’un fond musical bien concocté, tentent de persuader le public qu’il y a un message qui est véhiculé. Mais comment décrypter ces codes quand on est un profane du monde de la danse chorégraphique?

Ousseni Dabaré, dans « Et si … », invite tout un chacun à se poser les bonnes questions. Les réfugiés de guerre entachés dans des camps d’accueil, le terrorisme, la mauvaise gouvernance, les fausses promesses électorales ne sont-ils pas autant de maux qui contribuent à déshumaniser le monde ? Quelles sont les bonnes questions que l’on devrait se poser ? Doit-on trouver les réponses individuellement ou collectivement ? Ne sommes-nous pas responsables de nos malheurs ?

Voici en substance ce que traduit « Et si … » dans la conception du danseur. Les tubes symbolisent des murs ou des maisonnettes, la veste incarne l’autorité, le parloir, c’est l’attitude du politique à promettre ciel et terre à son électorat. Tout a une fonction assez significative dans cette chorégraphie.

« Et si … » est le fruit d’une recherche qui dure depuis 2014. Ousseni était appelé à travailler avec l’international danseur chorégraphe burkinabè, Salia Sanou, dans un camp de réfugiés. Et c’est de là qu’est venu le questionnement rien qu’à vivre l’expérience dans une situation pareille.

Soutenu donc par le Bureau Burkinabè du Droit d’Auteur (BBDA) à travers le Fonds de promotion culturelle (FPC), Esprit entre en résidence de création d’où l’épilogue, présenté hier 14 novembre à un public restreint . « Et si … », bien qu’il soit un seul en scène, a connu la participation d’Issa Ouédraogo (scénographie), David Zoungrana (musique), Idrissa Kafando (assistant chorégraphe), Bienvenue Bazié (conseiller artistique) et bien entendu Ousseni Dabaré (conception et chorégraphie). La pièce se jouera publiquement, le 10 décembre 2020 à l’Institut Français de Ouagadougou, dans le cadre du festival Dialogue de corps.

Malick SAAGA

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