Ouagadougou, capitale du cinéma africain : Mythe ou réalité

Ouagadougou, capitale du cinéma africain : Mythe ou réalité

Créée en 1969, la Semaine du cinéma africain, devenue plus tard, le Festival panafricain du cinéma et de la télévision de Ouagadougou (FESPACO), a tout de suite été reconnue par les cinéastes africains de l’époque comme le carrefour du cinéma africain. Entre les Journées cinématographiques de Carthage (JCC) ou la réputation du Sénégal qui comptait plus de réalisateurs africains de cinéma dans l’Afrique subsaharienne, Ouagadougou a été désigné comme l’espace clé favorisant « un contact fructueux pour la revalorisation de la personnalité africaine ».

L’histoire du cinéma africain a commencé à s’écrire autrement à partir de la capitale politique burkinabè. Cela est salutaire, puisqu’il a fallu des précurseurs consciencieux avec l’appui de certaines élites pour y arriver.

Les efforts n’ont pas été vains car 22 ans après, le Burkina Faso est entré pour la première fois dans le palmarès de l’Etalon d’or de Yennega, la plus grande convoitise au FESPACO.  D’abord, le cinéaste feu Idrissa Ouédraogo (1991) et puis le réalisateur, Gaston Kaboré (1997). Après ces deux couronnements sur la plus haute marche, aucun autre réalisateur du pays n’a pu encore conquérir le sacre d’or qui, d’ailleurs, semble de plus en plus s’éloigner de la génération d’après Gaston Kaboré.

Qu’est-ce qui ne marche pas 23 ans après le mérite burkinabè ? Mauvaise politique du cinéma ? Absence de financement ? Formation inadaptée ? Incompétence des acteurs? Le FESPACO a pourtant pris des ailes au fil des années. En termes d’audience internationale, le Burkina Faso peut s’en féliciter. Cependant, la capitale du cinéma africain ne présente aucune industrie cinématographique digne de ce nom à l’image de Nollywood (industrie du cinéma nigérian), encore moins  de Hollywood (industrie du cinéma américain).

Les régimes qui se sont succédé ont toujours fait du cinéma, une place de choix dans leurs politiques culturelles respectives. Le 7e art est pratiquement l’un des rares secteurs où l’Etat burkinabè met les moyens pour soutenir la production cinématographique. Comparer au théâtre, à la musique ou à la danse, certains percevront la pertinence avérée de cette affirmation.

D’abord, une institution pleine et une Direction générale du cinéma et de l’audiovisuel, toutes rattachées au ministère de la Culture, des Arts et du Tourisme. Ni le 4e  art ni le 6e art ne dispose de tel privilège dans l’organigramme du ministère de la Culture.

Ensuite, l’on a encore en mémoire, le milliard du chef de l’Etat, Roch Marc Christian Kaboré en 2017, au profit des réalisateurs burkinabè pour leur faciliter la participation au FESPACO 2019. Et un autre milliard pour  appuyer l’organisation de ce cinquantenaire. N’y a t-il pas une volonté politique affichée?

C’est perceptible, le cinéma est une priorité dans la politique culturelle du pays. Mais est-ce que, ça l’est véritablement pour les acteurs de ce secteur ? Pourquoi cette absence d’industrie cinématographique au Burkina Faso? En quoi peut-on se vanter d’être la capitale du cinéma africain sans aucune grosse machine économique du cinéma ? Est-ce une ancienne gloire, un mythe ou une réalité tangible?

Le ministre burkinabé de la Culture, Abdoul Karim Sango a rapporté le 17 août dernier, que Nollywood génère 3000 milliards de FCFA à l’échelle alors que le budget de l’Etat burkinabè fait 2000 milliards de FCFA dont 8 milliards de FCFA alloués à la Culture, des Arts et du Tourisme. Il estime malgré tout que ce n’est pas un problème du Gouvernement, mais plutôt le regard que les acteurs portent sur leur métier. Qu’est-ce qu’ils veulent en faire? Le cinéma doit être pensé en tant qu’industrie et cela passe par la compétence, la compétitivité. Si le célèbre acteur burkinabè, Issaka Sawadogo et récemment le jeune acteur Moussa Yanogo tirent leur épingle du jeu en trouvant le chemin de Hollywood, il faut sans doute se dire que d’autres Burkinabè peuvent aussi vendre l’image du cinéma burkinabè.

Mais tant qu’on n’arrivera pas à installer une culture de l’industrie du cinéma burkinabè, tant que les banques, les opérateurs économiques ne s’impliqueront pas pour appuyer les efforts politiques, la réputation de la capitale du cinéma africain restera plus un discours creux, un mythe, loin de la réalité. Et c’est en cela que Laadowood s’avère une idée géniale qui doit être soutenue par plusieurs bras.

La Rédaction

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