Biens culturels burkinabè se trouvant en France : Restitution d’accord, infrastructures muséales adéquates d’abord

Biens culturels burkinabè se trouvant en France : Restitution d’accord, infrastructures muséales adéquates d’abord

La France a promis, à travers son président Emmanuel Macron en novembre 2017 à Ouagadougou, de rapatrier les biens culturels africains se trouvant dans leurs institutions patrimoniales. La mission de réflexion sur la restitution de ces biens culturels africains avait été confiée à l’historienne d’art, Bénédicte Savoy, et l’écrivain et universitaire sénégalais, Felwine Sarr. Une année après, les deux chercheurs ont produit un rapport dénombrant plus de 90 000 œuvres d’art africains dont plus de 1000 originaires du Burkina Faso exposés dans des musées français.  

Sur le continent africain, le Bénin est à l’avant-garde de ce combat pour le retour des biens culturels africains. Le président béninois, Patrice Talon a, en effet, demandé officiellement, en juillet 2016,  la restitution des œuvres d’art emportées lors de la conquête coloniale française à la fin du XIXe siècle. Le général Alfred Amédée Dodds (1842-1922), qui était à la tête de l’expédition, avait alors mené un pillage de grande ampleur des œuvres du royaume de Dahomey – l’actuel Bénin. Il est aujourd’hui difficile d’estimer avec exactitude le nombre des objets en question. Leur nombre serait estimé entre 4 500 et 6 000. De plus, certaines œuvres revêtent une importance symbolique particulière, à l’image des trônes des rois Ghézo, Béhanzin et Glélé, et des statues les représentant. En attendant, un collectif d’antiquaires et de collectionneurs d’art parisiens agissant à titre privé a décidé de rapatrier, au cours du premier trimestre de 2020,  au Bénin, 26 sceptres, pillés, lors de l’invasion de l’ancien royaume d’Abomey, par les troupes françaises.

Mais, coup de théâtre, le Benin a annoncé, en juillet 2019, selon un article du magazine Jeune Afrique, qu’il n’était pas encore prêt à accueillir ces objets pourtant demandés à la France. Un véritable pavé dans la mare qui  réjouit néanmoins,  les plus sceptiques en ce qui concerne les restitutions, en particulier ceux qui assurent que les pays africains y compris le Burkina Faso,  ne disposent pas des moyens technologiques et techniques nécessaires pour accueillir et exposer les œuvres dans des conditions satisfaisantes. Vrai ou faux ?

Un dépotoir d’antiquités

Une chose est sûre, notre pays, dès les premiers instants, a mis en place une commission gérée par la Direction générale du patrimoine culturel. Cette équipe regroupe des chercheurs d’université et des administrateurs du monde de la culture. Leur mission est d’étudier les voies et moyens nécessaires au retour de nos fameux biens culturels. Et cela est de bonne guerre, étant donné que ces objets culturels appartiennent à l’histoire et au patrimoine culturel du pays des Hommes intègres.

Leur destination n’est autre que cette terre libre de nos ancêtres. Mais, loin de sombrer dans un pessimisme béant, des interrogations subsistent tout de même. Avons-nous réellement les compétences nécessaires, en termes de ressources humaines, pour gérer ces biens si d’aventure, on nous les retournait maintenant ? Le Burkina Faso dispose-t-il des infrastructures adéquates, en matière de conditionnement pour les recevoir (conservation, disposition des objets, esthétique des lieux, éclairage, etc.) ? En effet, comme nous l’avons relevé, dans cette même tribune de Kulture Kibaré, l’éclairage contribue, par exemple, à la mise en valeur des objets exposés et par ricochet au confort des visiteurs.

En outre, l’éclairage est utilisé, dans tout musée moderne, pour interpréter l’objet et l’espace, permettant ainsi d’orienter, d’informer, de séparer ou de rassembler, de cacher ou de dévoiler, d’agrandir ou de réduire, sans pour autant détériorer les œuvres exposées. Sommes-nous à ce stade ? Toutefois, pour éviter au Burkina Faso, un « rétropédalage à la béninoise », les autorités burkinabè, à travers le ministère de tutelle, et ses différents démembrements, sont invités à anticiper les choses. Des institutions muséales dignes de ce nom doivent impérativement voir le jour. Quant aux populations, elles sont appelées à changer de paradigme. La perception du musée comme un « dépotoir d’antiquités » doit définitivement disparaitre des esprits.

La Rédaction

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