« Indigeste » : Le 3e épisode questionne l’insécurité
Le Centre de Développement Chorégraphique la Termitière a accueilli dans la soirée du 4 janvier 2020, le 3e épisode du spectacle « Indigeste ». Une pièce qui mêle la danse et le théâtre dans une chorégraphie de Marius Sawadogo et une mise en scène de Paul Zoungrana. Thème d’actualité, la présente saison dépeint le terrorisme et son impact sur les populations tout en soulevant des questionnements.
« Indigeste » est l’aboutissement d’un travail de recherche entre la danse et le théâtre. C’est un projet né en 2012 du danseur chorégraphe Marius Sawadogo et du comédien-metteur en scène Paul Zoungrana. L’idée dès le départ, à entendre le premier, était de creuser au fond de la danse pour sortir ses outils qui peuvent nourrir le théâtre et vis-versa.
« C’est parti dans l’idée d’échanger des outils artistiques. On utilise la même scène mais souvent on a des différences d’outils. Or pourtant les uns peuvent nourrir les autres. Alors, on a réfléchi et on s’est dit pourquoi ne pas mettre en place un projet où les comédiens peuvent avoir les outils de la danse et les danseurs en retour, les outils du comédien », a expliqué Marius Sawadogo. C’est dans cet esprit que le projet a été conçu, muri et présenté de façon épisodique.
« Indigeste » est donc un laboratoire qui dure maintenant sept (7) ans dont les thèmes abordés campent sur l’actualité des sociétés africaines. Marius et Paul ont d’abord soulevé le débat sur les jeunes diplômés qui errent sans emploi dans le tout premier épisode d’ « Indigeste » avant de s’intéresser à l’immigration dans l’épisode 2 en 2014.
Toujours intéressé par des thèmes d’actualité, quoi de plus normal que de s’interroger en ce moment sur le terrorisme qui sévit les pays du Sahel dont le Burkina Faso, dans le 3e épisode ? Un sujet délicat et embarrassant qui agace chaque Burkinabè.
Ainsi dans cette pièce, le duo mixte, Dramane Zongo et Odile Somé, a fait revivre les émotions à travers les attaques perpétrées par les forces du mal dans les localités exposées, le cri des familles endeuillées, l’effroi et la psychose des populations. Sur fond de voix off et du slam « 100 millions d’années » de Naël Melerd, la parfaite symbiose artistique sur scène laissait transpercer les cœurs des spectateurs sensibles. Un spectacle qui a, dans sa chute invité le public à rejoindre le duo de la soirée sur la scène, symbole fort d’une résistance des populations en grand nombre.
L’objectif du spectacle n’est pas selon les deux artistes de créer davantage de la frayeur chez les uns mais de susciter des débats, des discussions sociales, de donner son point de vue sur l’insécurité en cours, en tant qu’artiste au-delà même de la scène.
« Dans la situation sécuritaire de notre pays, qu’est-ce qu’un artiste peut proposer de concret ? Ce sont des idées. On ne peut les proposer qu’avec notre art. Notre objectif, c’est de créer des débats autour des situations d’actualités. C’est enrichir, échanger, aller vers l’autre pour avoir le point de vue de chacun. C’est la base même du projet indigeste », a confié Marius.
Et à Paul de soutenir que la seule porte qu’ils essaient tous ensemble d’ouvrir via cette pièce est le rêve. « Je crois personnellement qu’il ne faut pas qu’on arrête de rêver malgré l’adversité. C’est vrai qu’on nous dit de ne pas avoir peur mais tout le monde n’est pas courageux. Je crois que la seule chose qu’on ne doit pas perdre en vivant dans une situation de guerre, c’est le rêve. Il faut continuer à rêver que le lendemain peut être meilleur. Il faut rêver et continuer à faire des projets », a indiqué celui-ci.
Le 3e épisode du spectacle « Indigeste », a bénéficié du financement du Fonds de promotion culturelle du BBDA, si l’on s’en tient à Marius Sawadogo. Il a saisi l’occasion pour remercier tous ceux qui ont facilité la mise en œuvre de ce projet de recherche qui continue de cuire au laboratoire.
Le spectacle se poursuit ce dimanche soir 5 janvier au CDC la Termitière (20 heures) avant de revenir les 10 et 11 janvier prochain au Théâtre Soleil, sis au quartier Cissin de Ouagadougou.
Malick SAAGA