Rétrospective culturelle 2019 : Les angles de tir

Rétrospective culturelle 2019 : Les angles de tir

Nous entamons l’année 2020. Les défis sont énormes et les attentes n’en demeurent pas moins. De prime abord, il est à rappeler que l’extrémisme violent qui sévit reste le plus grand souci des Burkinabè. Car aucun développement ne saurait se bâtir dans une instabilité politique, économique, sécuritaire et culturelle. Que peut-on faire de plus face à cette percée terroriste qui impacte négativement sur la vie des Burkinabè ce si n’est de stimuler de résiliences fortes ? Fort heureusement les forces du mal semblent décélérer leurs viles actions, ces derniers mois grâce aux efforts conjugués des fils intègres.

L’impact de l’extrémisme violent sur la vie culturelle

Nonobstant les victoires engrangées en décembre 2019, la vie culturelle est restée moins ou presque pas animée dans les localités qui subissent l’exacerbation des attaques. Bien évidemment, dans un tel contexte, il est pratiquement impossible de se réjouir autour de festivals, de concerts et de manifestations culturels reluisants. Du coup, toutes les activités ont eu pour chute, la capitale et les autres villes moins exposées, à savoir Bobo-Dioulasso, Koudougou, etc. Nous avons alors pu assister à pas mal d’évènements culturels qui ont rythmés nos villes. Des ateliers et rencontres sur les faitières de la culture aux débats et discussions en passant par les actions culturelles, Ouagadougou et ses zones environnantes ont vibré de mille feux.

La conférence inaugurale de diffusion des résultats du colloque national sur l’extrémisme violent et les valeurs de référence qui a pu réunir des experts à Banfora et à Gaoua en 2019 pour mieux débattre des valeurs identitaires cardinales afin de venir à bout du terrorisme et autres violences est un bel élan. Aussi, certains artistes chanteurs se sont rués en vache pour galvaniser les forces de défense et de sécurité au front à travers des chansons d’hommage. Plusieurs autres initiatives personnelles ou collectives n’ont point tari et avec pour même effet : donner du punch aux troupes.

FESPACO, TAC, FILO, …

2019 a été l’année qui a accueillie malgré tout, le cinquantenaire du FESPACO. Même si, au niveau organisationnel il y a eu des maladresses tant dans la cérémonie d’ouverture que la fermeture, le Burkina Faso peut bien se vanter d’avoir relevé le défi dans l’ensemble, en préservant sa réputation de capitale incontournable du 7e art en Afrique.

2019 a enregistré victorieusement l’inscription des sites de métallurgie ancienne du fer à travers les hauts fourneaux, dans le patrimoine mondial de l’UNESCO. Ce fut un pari historique gagné par le ministère de la Culture, des Arts et du Tourisme (MCAT) à travers sa Direction Générale du Patrimoine Culturel (DGPC) mais aussi par tous les Burkinabè.

Le Traité d’Amitié et de Coopération à travers sa première édition des journées culturelles ivoiro-burkinabè a rapproché culturellement les deux pays et par ricochet les deux peuples.

Que dire de la Foire Internationale du Livre de Ouagadougou (FILO) qui a eu un engouement singulier. Plus de 6000 visiteurs en 4 jours d’échanges. Cette énième édition a marqué d’une pierre angulaire la volonté de l’Etat de redonner goût à la lecture.

Manifestations et activités culturelles au Burkina Faso

2019, ce fut aussi l’année de grogne sociale au niveau du MCAT. Le SYNATRACT et d’autres syndicats de la faîtière musique surtout sont montés au créneau en durcissant plus le ton. Des rencontres ont été empêchées, des retards observés sur certaines réalisations du département culturel, à l’image du guide des festivals et manifestations culturels au Burkina Faso qui n’a pas été actualisé. Selon la Direction Générale des Arts (DGA), ni 2018 ni 2019 n’a pu être consacré à une actualisation dudit manuel. Le seul document officiel et scientifique de référence reste celui de 2016. A l’en croire, le Burkina Faso compte au total 186 festivals et manifestations culturels contre 117 en 2014.

BBDA, CENASA, …

Les autres structures du département culturel se sont investies. Le Bureau Burkinabè du Droit d’Auteur (BBDA) a collecté au cours de l’année 2019, à entendre son directeur général, Wahabou Bara, plus de 1,9 milliard de FCFA de droits d’auteurs soit un taux de 132% comparativement en 2018. Cette maison de gestion collective continue de multiplier les actions pour répondre aux besoins pressants de ses créateurs membres. Il y a du  dynamisme, il y a de la volonté assez perceptible dans les faits et gestes.

Bien que le théâtre national Koamba Lankoandé du CENASA soit encore prisé en 2019 par l’ensemble des acteurs culturels, les insuffisances dans sa gestion pratique restent un fait. Malheureusement, à ce niveau la grogne des acteurs fait de plus en plus écho dû aux conditions de location « arbitraire » décriées par une certaine catégorie d’artistes professionnels (confère éditorial Kulture Kibaré). Le CENASA n’a pas une communication par excellence comme celle du BBDA. Les plaintes verbales persistent à chaque fois qu’un quidam désire la salle pour un concert ou un spectacle vivant surtout. Pour preuve, le dernier communiqué de son service communication et marketing est resté compendieux, flou et évasif, en réponse à notre éditorial du 18 décembre 2019.  Il a déclaré en ces termes : « concernant les spectacles dont les installations exigent plus de temps, il est demandé aux organisateurs de bien vouloir toujours approcher, à temps, la direction en charge de la programmation afin de trouver un compromis ». Imprécis ! La gestion de ce foyer des artistes a plus besoin du dynamisme que de la frime.

Musique

Au cours de l’année 2019, les présentations discographiques n’ont pas manqué de réunir non pas la presse mais les hommes de médias. La nuance ce qu’on n’a pas toujours des journalistes dans les dédicaces mais plutôt des animateurs et autres MC mus en journaliste. Il y a eu véritablement des sorties mais les œuvres musicales dans l’ensemble sont indifférentes en terme créativité. Les artistes-chanteurs ont encore manqué du cran et se sont adonnés à la facilité dans leurs compositions musicales, du déjà-entendu et du déjà-vu.

2019, les albums de Bil Aka Kora et Alif Naaba étaient très attendus. Ils auraient pu marquer la différence. Malheureusement, les mélomanes attendront peut-être cette année 2020. Si le « Prince aux pieds nus » a déjà annoncé dans son dernier single, un avant-goût de son prochain opus, force est de constater que bien que cette chanson reste identitaire et bien le style de Alif, elle n’a rien de particulier à relever. Ce que certains attendent de Alif Naaba, c’est bien plus que du Alif Naaba. Il doit surprendre et faire mieux que ça.

Le statut de l’artiste au Burkina Faso

Jusqu’en janvier 2020, l’artiste burkinabè ne dispose toujours pas d’un statut. Si le militaire, le policier ou le médecin en détient, ce n’est pas le cas chez l’artiste. Mais, tout porte à croire que la première carte d’artiste délivrée par la Direction Générale des Arts sera effective en 2020, foi de Thierry Millogo, responsable de Commission nationale des arts en charge du dossier. Un partenariat a été signé, a-t-il confié, avec l’Office national de l’identification en fin 2019, un pas vers la concrétisation.

Artistes et projet

Si l’on peut reprocher à bon nombre d’artistes burkinabè de ne pas disposer d’un plan de carrière, d’une feuille de route bien tracée pour mener de façon professionnelle leurs activités, ce n’est pas le cas avec l’artiste raconteur Kientega Pingdewindé Gérard dit KPG. 2019 a vu la réalisation de son projet « Conte à l’école » qui consiste à sillonner les écoles primaires pour offrir aux jeunes élèves du spectacle de conte-sensibilisation. Il s’est agi pour l’artiste d’œuvrer à faire revivre les contes en milieu scolaire, outil pédagogique efficace selon lui, pour mieux se reconnecter avec son histoire.

L’année 2019 nous a fait revivre des instants heureux ou malheureux, mais d’importants défis restent à relever aussi en 2020 que les années à venir.

La Rédaction

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