Récréâtrales 2024 : « Tu dis PDI », une pièce visiblement thérapeutique
Vingt-quatre heures après l’ouverture officielle de la plateforme festival des Récréâtrales, la cour de l’INAFAC à Ouagadougou, a accueilli la pièce théâtrale « Tu dis PDI ». Conçue par l’auteur, dramaturge et metteur en scène, Aristide Tarnagda, ce spectacle est une sorte de témoignage des expériences vécues par des Personnes déplacées internes (PDI) au Burkina Faso. Il réunit d’ailleurs sur scène près de cinquante PDI et jeunes du quartier Bougsemtenga.
Douleur, résignation, espoir… en ces termes, on pourrait bien résumer « Tu dis PDI ». Une pièce pluridisciplinaire présentée dans le cadre de la 13e édition des Résidences panafricaines d’écriture, de création et de recherche théâtrales – Récréâtrales. Lire aussi : https://kulturekibare.com/2024/10/27/13e-edition-des-recreatrales-lancement-officiel-des-activites-de-la-plateforme-festival/
En effet, ce spectacle s’inspire du projet « Terre Ceinte » qui cherche à offrir aux victimes du terrorisme, des moyens culturels et artistiques pour recréer des liens et retrouver du sens. Il s’agit de joindre l’acte à la parole pour mieux exprimer des ressentis, calmer les esprits et renforcer la capacité à surmonter toutes ces rudes épreuves.
Selon l’instigateur de cette approche visiblement thérapeutique, Aristide Tarnagda donc, l’idée est de faire de l’art et de la culture des puissants instruments devant permettre la renaissance des Personnes déplacées internes (PDI), et en particulier celles qui participent au projet depuis 2021. « Pour moi, ce n’est pas un simple spectacle. C’est un acte de solidarité et d’attention envers les sœurs, mères et frères qui traversent des moments difficiles. C’est surtout une épaule tendue. Nous pensons que chaque Burkinabè doté d’un talent, peut et doit contribuer à sa manière, à apaiser cette violence », a expliqué Aristide.
Une cinquantaine de bénéficiaires dont des PDI de Kaya et Tenkodogo ainsi que des jeunes de Bougsemtenga sont invités sur scène. Après trois semaines de résidence à Tenkodogo et deux semaines à Ouagadougou, le spectacle créé, d’environ 1 heure 30 minutes, présente une série de tableaux. Il allie théâtre, chant et danse pour traduire les émotions. Cette réalisation artistique a été rendue possible grâce à la collaboration entre Aristide Tarnagda, son assistant Vincent Kaboré et le chorégraphe Djibril Ouattara. Au-delà des conséquences du terrorisme, la pièce « Tu dis PDI » aborde également d’autres thématiques telles que l’injustice sociale, la mauvaise gouvernance, entre autres.
« Terre Ceinte », projet initial de cette pièce, a reçu le soutien de l’Ambassade du Canada au Burkina Faso et au Bénin à travers le Fonds canadien d’initiatives locales (FCIL). Marie-France Vary, conseillère politique à l’ambassade, a alors exprimé son émerveillement après la représentation. A l’en croire, le soutien à ce projet s’inscrit dans la volonté de son institution à soutenir les Burkinabè en général et les femmes PDI en particulier en vue de relever les défis liés à l’insécurité et renforcer leur résilience. Elle dit fonder l’espoir que ce spectacle contribuera à sensibiliser le public pour la cause des PDI, la cohésion sociale et la paix au Burkina Faso.
L’un des objectifs de cette pièce est d’offrir aux PDI une forme de thérapie. Poko Kiema, une PDI participante de Kaya, a confié se sentir soulagée depuis sa participation. « Le jour où les terroristes ont attaqué mon village dans le Centre-Nord, ils ont abattu 56 personnes. J’ai perdu six de mes frères. Il y a un mois à peine, j’en ai encore perdu deux autres. La vie après tous ces drames n’est pas simple. Mais grâce à ma participation à la pièce, je retrouve un peu de sourire », a-t-elle témoigné. Et comme Poko, bon nombre de participants, marqués par des expériences similaires, tentent de guérir leurs traumatismes à travers le spectacle « Tu dis PDI ».
La pièce reste à l’affiche de cette 13e édition des Récréâtrales. Elle sera également programmée pour la saison des Récréâtrales en décembre prochain. D’autres représentations sont prévues à Bobo-Dioulasso, Tenkodogo, et si possible à Kaya.
Boukari OUED
Kulture Kibaré