Adhésion à l’Association M’Bomen : « Ce sont toutes les grosses têtes à l’exception d’Irène Tassembedo », Bienvenue Bazié

Adhésion à l’Association M’Bomen : « Ce sont toutes les grosses têtes à l’exception d’Irène Tassembedo », Bienvenue Bazié

M’Bomen, dansons en fulfuldé, est une association à vocation culturelle. Elle regroupe plusieurs danseurs et chorégraphes du Burkina Faso et de sa diaspora. Son objectif, défendre les intérêts moraux et matériels des acteurs de la filière. Mais est-ce la première communauté associative qui œuvre à la promotion de la création chorégraphique au Burkina Faso? Tout le monde y adhère ? Cette association est-elle représentative ? Quel est l’intérêt d’en être membre ? Pourquoi Irène Tassembedo a quant elle, préféré rester en marge de M’Bomen ? Nous avons reçu le président de l’Association M’Bomen, Bienvenue Bazié, le 16 février 2021, au siège de Kulture Kibaré, Ouagadougou, pour mieux éclairer les lanternes.

Bienvenue Bazié, Président de M’Bomen

Kulture Kibaré (K.K) : Que signifie M’Bomen ?

Bienvenue Bazié (B.B) : M’Bomen signifie, dansons. C’est en fulfuldé. C’est une invitation à tous les danseurs et chorégraphes à se mettre ensemble pour construire et développer la danse au Burkina Faso, pour un meilleur rayonnement dans le monde.

K.K : Qu’est-ce qui vous a motivé à créer cette association ?

B.B : On remarque aujourd’hui que le milieu de la danse, particulièrement la chorégraphie, connaît une évolution ces dernières années avec un rayonnement au plan national et beaucoup plus à l’international où les compagnies se sont fait connaître. Mais il manque vraiment un vrai ancrage au niveau national. C’était alors bien pour nous de s’organiser et de voir dans quelle mesure, nous pouvons travailler entre danseurs et entre chorégraphes; En fait, proposer une structure culturelle chorégraphique et aussi de voir comment on peut se mettre ensemble au plan local afin d’avoir le même rayonnement de la danse ici comme à l’international?

Quand les membres accordaient leur violon …

K.K : Vous évoquiez tantôt deux termes clés de votre univers artistique. L’occasion faisant le larron, quelle est la différence entre un danseur et un chorégraphe ?

B.B : La danse est un moyen d’expression. Un travail par le corps où on peut dégager des émotions, exprimer sa joie, sa colère, etc. Elle se décline sous plusieurs formes dans un contexte ou dans un autre. La chorégraphie, c’est l’écriture de la danse. L’art qui passe par la recherche, par la réflexion, etc. en prenant en compte un espace donné. Elle peut aussi réunir d’autres éléments à son service comme la lumière, la musique, la scénographie, etc.

K.K : Comment  les danseurs et les chorégraphes sont parvenus à l’Association M’Bomen ?

B.B : D’abord, la réflexion a débuté en 2018 où entre chorégraphes, on se posait les mêmes questions, on partageait les mêmes visions et réalités. Ensuite, petit à petit, on a décidé de mettre en place une association, très active, c’est-à-dire qui fonctionne avec un bureau dynamique pour faire bouger les choses. De fil en aiguille, nous avons tenu plusieurs réunions animées par l’écriture du procès-verbal. Le compte rendu a été ensuite fait aux danseurs et chorégraphes qui en ont pris connaissance. Les uns et les autres ont fait le choix d’adhérer et de participer à la réflexion. Très vite, une équipe s’est constituée pour participer à l’écriture des statuts et règlements intérieurs à Ouagadougou. A Ouagadougou parce que, par manque de moyens on ne pouvait pas se déplacer partout au Burkina Faso, dans ce premier moment, pour fonder les bases. Après, nous avons décidé de créer très vite une page Facebook qui nous permet de réunir tous ceux qu’on peut réunir. Parce que M’Bomen, ce n’est pas seulement ceux qui sont au Burkina Faso mais, il y a également ceux de la diaspora qui, via internet, participent aux différentes rencontres. Après, nous avons entamé les démarches nécessaires pour l’obtention du récépissé de l’association en fin 2020. Nous sommes donc légalement reconnus et le dossier est déposé au journal officiel qui va paraître au mois de mars 2021. Mais en attendant, nous continuons de mener des activités.

L’échec de l’ABCD

K.K : Etes-vous la toute première association regroupant des danseurs et chorégraphes nationaux et ceux de la diaspora burkinabè ?

B.B : Il faut dire qu’il y a eu la création de l’ABCD qui signifie, Association Burkinabè des Chorégraphes et Danseurs, entre 1999 et 2000. Elle était censée réunir l’ensemble des danseurs et chorégraphes, proposer des activités, défendre les intérêts matériels et moraux des acteurs. Mais l’ABCD n’a pas fonctionné parce qu’il y a eu des premières rencontres et depuis, plus rien. Donc si je pars des années 2000 à maintenant, on peut dire qu’il y a plus de 15 ans qu’on n’a pas eu une réunion qui a été convoqué par l’ABCD pour réfléchir sur ses activités. Il y a eu une tentative de ressusciter cette association par Lassann Congo, qui était le président à l’époque, mais cela a échouée. On s’est dit que si, il est difficile de ressusciter quelque chose, peut-être qu’il faut en faire naître une autre, d’où est partie vraiment l’idée de créer M’Bomen afin de repartir sur d’autres bases, et avec des personnes qui sont prêtes à s’engager, donner de leur temps et de leurs énergies.

« Ce sont toutes les grosses têtes à l’exception d’Irène Tassembedo qui a émis le souhait de rester un peu en dehors de cette association »

K.K : Alors, avez-vous consulté certaines icônes à l’image de Salia Sanou, Seydou Boro ou Irène Tassembedo pour la création de M’Bomen ?

B.B : Elles ont toutes été approchées. Salia Sanou et Seydou Boro reconnaissent le projet. Le dernier a participé aux réunions dès qu’il le pouvait. Irène Tassembedo a reçu les procès-verbaux. Elle été approchée par moi-même, pour lui parler de cette volonté de se réunir pour travailler ensemble. Lassann Congo a tout de suite adhéré, de même que Salia Sanou, Seydou Boro, Serge Aimé Coulibaly, Olivier Tarpaga, j’en passe. Ce sont toutes les grosses têtes à l’exception d’Irène Tassembedo qui a émis le souhait de rester un peu en dehors de cette association pour l’instant. Sinon tous ont vite adhéré. Nous avons fait des rencontres et tout dernièrement c’était à Bobo-Dioulasso.

… pour défendre les mêmes intérêts

K.K : Quelles sont les raisons qu’Irène Tassembédo a avancé afin de rester en marge de votre association ? 

B.B : Elle n’a pas avancé de raisons quelconques à ce que je sache à part de dire : non, pour l’instant, elle préfère rester en dehors et observer. Peut-être qu’un temps viendra où elle va adhérer. Mais elle n’a pas évoqué de raisons claires. Je voulais aussi précisé que nous avons été réunis à l’Audace Africa pour la désigner comme la représentante de la danse. Je ne me rappelle pas de l’année exactement. Mais depuis, je peux dire que nous n’avons aucune information. On ne sait pas ce qui se passe au haut niveau. Je pense que ce sont des choses également à corriger.

K.K : Est-ce qu’il existe des conflits d’intérêts ou encore des tensions dans le milieu de la danse ?

B.B : Des conflits d’intérêts, il doit en avoir. Je n’ai pas vraiment d’exemples clairs mais je pense que ça ne manque pas. Nous sommes dans une grande famille et on peut marcher sur le pied de l’autre.

K.K : Que voulez-vous implicitement avoué ? Y a-t-il des divisions au sein de la filière danse chorégraphique au Burkina Faso ou pas ?

B.B : Des divisions ? Je ne peux pas l’avouer. Je ne sais vraiment pas trop. Je ne peux pas l’affirmer parce que, quand je parle de l’ABCD que nous avions voulu ressusciter, elle (ndlr Irène Tassembedo) s’était portée volontaire pour assurer la présidence. Nous avons tenu des réunions chez elle à EDIT, quand l’école était toujours à Samandin avant d’être menacée. Elle a proposé de tenir les réunions là, et elle a voulu être la présidente. Alors cela m’amène à vous répondre que le milieu n’est pas divisé, sinon elle n’allait pas se proposer d’être présidente. Et encore quand on a voulu choisir un représentant de la danse pour représenter notre filière au niveau de la FN PRo-scène, on s’est encore réuni. Irène était présente. C’est même elle qui a été désignée pour représenter la danse. Pour moi, s’il y avait un problème, elle allait le dire. Mais avec M’Bomen, je l’ai approchée. C’est vrai que nous avons commencé à mettre en place cette association et c’est vers la phase de réflexion que je l’ai approchée. Elle a demandé à voir le contenu de ce qui est déjà dit. Et sa position est connue par la suite.

K.K : Malgré tout, vous vous sentez représentatif et légitime ?

B.B : On ne peut pas avoir tout le monde et aucun domaine ne peut prétendre cela. Mais, dans la filière danse contemporaine, on a eu presque tous ceux qui exercent et les anciens aussi, à M’Bomen. Nous avons tenu des réunions où des danseurs chorégraphes ont participé. Après la phase de Ouagadougou, nous avons eu aussi une rencontre avec les danseurs et chorégraphes de Bobo-Dioulasso, qui ont tout de suite adhéré. Ils sont même prêts à mettre en place une cellule de réflexion et de travail au niveau de Bobo-Dioulasso pour qu’ensemble on atteigne les objectifs. Nous allons poursuivre dans la même dynamique vers d’autres villes, Koudougou, Ouahigouya, etc. pour voir qui ou quelle compagnie de danse va adhérer à l’Association M’Bomen pour qu’on puisse, d’une seule voix défendre nos intérêts.

K.K : Quels sont les avantages d’être membre de l’Association M’Bomen ?

B.B : Pour l’instant, nous sommes à nos débuts, mais nous savons qu’il y a beaucoup de chose à changer. Il faut d’abord avoir un encrage réel au niveau national. Nous sommes une discipline où l’activité est mal ou très peu connue au plan local. Il y a donc un travail à faire ensemble en amont. Une structure à elle seule ne peut pas. Il faut composer avec tout le monde, c’est-à-dire, ceux qui créent, ceux qui diffusent, ceux qui produisent, etc. même avec les administrateurs aujourd’hui, qu’on ne cite pas souvent. Nous réfléchissons à cette synergie. Et c’est ensemble, les idées, les propositions des uns et des autres que nous pouvons construire pour des générations futures. Adhérer à M’Bomen, c’est pouvoir également participer aux prises de décisions au haut niveau de notre pays. On doit constituer donc une force qu’on pourra s’accrocher. En plus de cela, il faut dire qu’il y a plusieurs burkinabè qui ont des festivals à l’international et qui peuvent faciliter la mobilité ou la présence de nos jeunes frères à l’international. Le fait d’être membre de M’Bomen va faciliter tout cela.

K.K : Quelles sont les activités déjà menées au sein de l’association?

B.B : Nous avons eu des rencontres dans le cadre de M’Bomen pour nous informer auprès des différentes structures culturelles, comme Ankata. Il y a eu des rencontres qui ont été organisées pendant la période de Covid-19, sur internet et cela nous a permis de nous connaître, connaître nos structures, les grands noms de la danse au Burkina Faso. Voilà quelques activités que nous avons pu mener. Nous avons aussi en projet de continuer ces présentations et d’inviter davantage des structures comme la CNSS, le BBDA, les bureaux d’assurance pour nous présenter les différentes possibilités de cotisations ou de droits, etc. à leur niveau. Par exemple, au niveau de la danse, il faut préparer sa retraite. M’Bomen, va en tout cas, mener ces activités du genre.

K.K : Quelle est la source de financement des activités et même du fonctionnement de M’Bomen?

B.B : Il faut dire qu’il n’y a rien. Rire ! Pour l’instant, on est à notre début. On a aujourd’hui, comme fonds, l’adhésion des danseurs et danseuses. Nous avons un peu de sous, d’ailleurs que nous n’utilisons pas. Pour l’instant, nous avons pu créer le logo M’Bomen avec le soutien de Solnicka Michaela. Nous avons parmi nous, certaines personnes qui gèrent la page Facebook comme Robert Kiki, par ailleurs, Secrétaire général de M’Bomen. Il permet en tout cas de donner une visibilité pour tout ce que nous menons, de présenter les différentes structures artistiques, etc. C’est des gens qui donnent de leur temps, de leur énergie pour que les choses avancent, tout comme moi. Pour l’instant, nous n’avons pas de fonds.

K.K : Quel est le défi que vous entendez relever ensemble ?

B.B : Le défi pour nous, c’est d’arriver à réunir tous les danseurs et chorégraphes du Burkina Faso et de sa diaspora, et les faire adhérer, pour qu’on travaille ensemble et défendre d’une seule voix nos intérêts.

K.K : L’Association M’Bomen a vu récemment le jour, est-ce qu’elle compte se greffer à la Confédération nationale de la culture (CNC) ?

B.B : Pour l’instant, nous ne pouvons rien dire. Je pense que nous allons étudier la question. Nous allons chercher à savoir concrètement quel intérêt nous avons à adhérer à cette confédération. Est-ce que cette intégration aura un impact quelconque sur notre organisation de façon positive ? C’est vraiment une question à étudier. Et si ça nous arrange, nous n’hésiterons pas à adhérer. Et si nous voyons qu’en tant qu’association, nous pouvons aller loin et faire bouger les choses nous n’hésiterons pas. Peut-être que nous avons besoin dans un premier temps de rester en association pour être solidement structuré et efficace. Avec le temps, nous saurons mieux nous positionner. Je pense qu’on est jeune et la première des choses, c’est vraiment de se construire nous-mêmes, d’êtres solides, de comprendre qui on est, qu’est-ce qu’on veut et où on veut aller, avec qui on veut travailler ou pas ?

K.K : qu’avez vous d’autres à dire ?

B.B : On a tout abordé, je pense. Peut-être c’est de rappeler les membres du bureau de l’Association M’Bomen. Je suis le président ; Serge Aimé Coulibaly est le vice-président ; Robert Kiki est le secrétaire général et notre sœur Aïcha Kaboré est trésorière. On a un conseil d’administration dont font partie Salia Sanou, Olivier Tarpaga, etc. Pour l’instant M’Bomen est représenté à Ouagadougou et à Bobo-Dioulasso.

Interview réalisé par Malick SAAGA

 

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