Développement de la culture au Burkina Faso : Réflexion sur un mécanisme pérenne de financement des acteurs
Le ministre de la Culture, des Arts et du Tourisme (MCAT), Abdoul Karim Sango a procédé, dans la matinée du 19 octobre 2020 à Bobo-Dioulasso, à l’ouverture du « Séminaire national sur le financement des opérateurs culturels majeurs ». Il s’agira de réfléchir sur un mécanisme de financement pérenne et d’appui technique des opérateurs culturels majeurs du Burkina Faso.
La culture constitue un véritable levier de développement d’une nation. Conscient, le Burkina Faso à travers le ministère de la Culture, des Arts et du Tourisme (MCAT), multiplie les actions pour garantir un environnement viable et pérenne de ses industries culturelles. Malgré les efforts, la faiblesse du financement public, les difficultés d’accès des opérateurs culturels aux institutions financières (banques, microfinances, etc.), la faible pratique du mécénat et du sponsoring, demeurent en grande partie absentes dans le développement de la culture au Burkina Faso.
« L’apport de la culture, même si au Burkina Faso, on est encore en retard sur les statistiques, est énorme au plan de la contribution au produit intérieur brut. Donc, de ce point de vue, il était important que nous marquions un temps d’arrêt pour revisiter le mécanisme de financement que le Burkina en relation avec les partenaires techniques et financiers a mis en place pour supporter et accompagner ce secteur », a relevé le MCAT, Abdoul Karim Sango.
Ce présent « Séminaire national sur le financement des opérateurs culturels majeurs », réunissant les acteurs culturels, vient donc à point nommé. Il s’agira pour les participants, a indiqué le ministre, « d’identifier les goulots d’étranglement des opérateurs culturels en matière de mobilisation et de gestion de ressources financières et proposer des solutions y relatives ; revisiter le mode de financement des opérateurs culturels majeurs au Burkina Faso, en tenant compte du contexte d’insécurité et de la Covid-19 ; déterminer les critères clés d’identification des opérateurs culturels majeurs et enfin identifier les mécanismes d’accompagnement institutionnel à mettre en place pour assurer le financement pérenne des acteurs culturels majeurs ».
L’apport de la Suisse dans le secteur de la culture
Partenaire technique et financier (PTF) du Burkina Faso depuis des années, le Bureau de la Coopération Suisse, à travers son représentant Alexander Widmer, a avoué que le secteur de la culture et du tourisme burkinabè « connaît une vulnérabilité certaine de financement, et ce, encore plus dans le contexte actuel de la pandémie sanitaire de la Covid-19 ». C’est pourquoi, a-t-il rappelé, le Bureau de la Coopération Suisse n’a cessé d’accompagner depuis plusieurs années la culture et le tourisme burkinabè en appliquant dans son principe, 1 % culturel sur son programme pays de coopération au profit d’opérateurs culturels et autres initiatives culturelles innovantes et structurantes. Entre 2007 et 2018, la Suisse a investi dans la culture burkinabè, selon toujours les propos de M. Wildmer, plus de 2, 35 milliards de FCFA à travers son programme d’appui au secteur de la culture.
En prenant part à ce séminaire, les attentes se résumeraient, à en croire le représentant de la Coopération Suisse, à « sortir avec une solidité majeure, par rapport à la pérennisation de financement, et aussi des idées concrètes sur comment attirer d’autres partenaires financiers à disposer des mécanismes d’accompagnement des acteurs culturels qui soient viables pour permettre au secteur de se développer ».
Martin Zongo penche pour un financement intérieur pérenne
Administrateur du Carrefour International de Théâtre de Ouagadougou (CITO), Martin Zongo a laissé entendre que le Burkina Faso est reconnu pour la vitalité de sa production artistique et culturelle, pour le dynamisme de ses opérateurs. Malheureusement, le financement des activités est un sérieux tendon d’Achille. Ce séminaire, a-t-il informé, est l’aboutissement d’une longue quête des opérateurs culturels en général et des opérateurs culturels majeurs en particulier. « Nous sommes obligés de parcourir les eaux et les airs pour trouver des partenaires, généralement extérieurs qui financent nos activités. Ce qui n’est pas très conforme à l’intégrité et à l’autonomie que notre pays recherche depuis un certain temps », a-t-il laissé entendre. Il fait sien de l’adage qui dit « lorsque vous dormez sur la natte d’autrui, vous dormez par terre », juste pour traduire que la main qui donne, est celle qui dirige. C’est pour cela, il a estimé qu’il faudrait aller vers des ressources de financements internes qui vont permettre aux acteurs culturels burkinabè d’avoir une certaine indépendance dans la création, mais aussi et surtout de pérenniser leurs activités. Aurait-il eu tort d’affirmer qu’il suffit qu’un partenaire suspende son financement pendant une année et des structures telles que le CITO s’effondre? L’importance de ce séminaire, de son avis donc, serait de trouver les voies et moyens pour assurer un financement intérieur, un financement national pérenne pour soutenir les activités des structures et des opérateurs culturels majeurs du Burkina Faso.
Serge Aimé Coulibaly est un international danseur chorégraphe burkinabè. Il représente le laboratoire international de recherche des arts de la scène, Ankata, basé à Bobo-Dioulasso et dont il est le fondateur. Il sera paneliste, mais avant, il a d’emblée fait comprendre que l’essentiel dans cette réflexion est de « voir comment les structures majeures peuvent continuer à fonctionner, c’est-à-dire, les frais de base et puis l’administration ? ». En tant qu’artiste danseur chorégraphe international, il a, pour sa part, expliqué que « le premier financement doit venir de l’Etat burkinabè. C’est lui, dans sa politique globale pour le développement de la culture doit repérer quels sont ceux qui sont les moteurs et puis les soutenir pour qu’ils tirent les autres vers de l’avant ». Toutefois, l’heureux distingué des Golden Afro Artistic Awards 2020 en Belgique, a insisté que la première source de financement, c’est aussi le travail.
La réflexion se poursuit jusqu’au 22 octobre prochain dans la Maison de la Culture, Mgr Anselme Titianma Sanon de Bobo-Dioulasso.
Malick SAAGA