Adresse à la nation du président du Faso : Voici le message en intégralité
Le président du Faso, Sandaogo Paul Henri Damiba s'est adressé à la nation, dans la soirée du 4 septembre 2022. Nous vous proposons donc l'intégralité de son message.
Peuple du Burkina Faso ;
Chers compatriotes ;
Burkinabè de la diaspora ;
Il y a cinq mois, je prenais date avec vous pour faire un
premier bilan d’étape du processus de reconquête de notre
territoire national entamé au lendemain du tournant
politique qu’a connu notre pays. Mais il sied, avant d’évaluer
le chemin parcouru, de vous décrire de façon explicite et
sans complaisance, la situation grave dans laquelle se
trouvait notre pays au moment où nous mettions en route
l’œuvre de restauration et de refondation.
Le mal qui nous ronge, est la résultante de plusieurs années
de compromissions politiques, de contradictions sociales et
d’amalgames de tous genres, qui ont fini par porter un coup
fatal à l’équilibre délicat, que nos devanciers avaient réussi
à trouver, pour permettre aux différentes communautés de
vivre ensemble malgré leurs différences. Incapables d’initier
le moindre sursaut collectif, nous avons laissé notre pays
sombrer. A tous les niveaux, nous avons failli.
A commencer par nous, Forces de défense et de sécurité,
chargées de défendre notre territoire et de protéger nos
populations. Les divisions internes nous ont fragilisés, au
point de remettre en cause les valeurs qui faisaient la
renommée du soldat Burkinabè.
Cela se ressent très logiquement sur notre engagement et
notre manière de mener la guerre contre le terrorisme.
Certaines actions des nôtres ont malheureusement plus
contribué à attiser le feu, plutôt qu’à l’éteindre. Cette réalité
concerne également les VDP qui, malgré leur bravoure, ont
parfois été utilisés ou manipulés à des fins de vengeance au
niveau communautaire.
La vérité est que cet état de délabrement moral, concerne
toutes les composantes de notre société. Le laxisme et le
clientélisme de tous genres, se sont érigés en règle, dans
une administration publique prise en otage par des
groupuscules. Dans les faits, le service public s’est mué en
système de corruption, de clientélisme et de marchandage
aux antipodes de la bonne gouvernance tant prônée. Au
point où les populations ont fini par développer un sentiment
de défiance envers les structures administratives publiques.
Des commis de l’État, politisés et sans honte, devenus de
vrais rapaces, à l’affût de la moindre opportunité pour aspirer nos maigres ressources publiques.
Le constat n’est guère plus reluisant sur le terrain de la
justice en laquelle le Burkinabè a perdu grandement
confiance. Une justice devenue un terrain d’affrontement
politique et où les luttes intestines l’empêchent d’assumer
son rôle de régulateur social. L’indépendance de la justice,
saluée par tous il y a quelques années de cela, semble être
mal assumée, et pose à nouveau l’épineuse question de
l’homme des pouvoirs et des institutions.
Au-dessus, il y a cette classe politique. Une élite censée
traduire les aspirations profondes du peuple en projets
salvateurs, mais qui malheureusement, s’est engluée dans
les méandres de luttes aux finalités malsaines et
opportunistes. Trop préoccupée par ses intérêts personnels,
insoucieuse devant la désespérance de la population, elle a
pour beaucoup fait le choix de rester dans des invectives
inutiles, dans l’achat des consciences par des distributions
d’argent, dont on doit chercher la provenance.
La consécration de l’impunité dans la gestion des deniers
publics a contribué à exacerber le sentiment d’injustice
sociale au point d’alimenter de nombreuses rancœurs contre
l’Etat et ses démembrements.
Et il y a enfin ce peuple. Ce pauvre peuple, laissé à lui-même, balloté de toutes parts, par les officines obscures
cachées derrière certaines technologies, et gavé
d’informations alarmistes par certains médias devenus de
dangereux outils de subversion. Un peuple qui n’a plus de
repère et qui n’arrive, ni à se mobiliser derrière son armée,
ni à se révolter contre l’ennemi. Un peuple qui a troqué ses
capacités de résilience contre un assistanat continu. Un
peuple en quête permanente de bouc-émissaire. Un peuple
qui est en train de perdre son âme mais qui ne s’en rend
même pas compte. Un peuple qui semble avoir décidé de
subir.
Voici, le portait de l’état dans lequel se trouvait le pays au
moment où nous prenions nos responsabilités pour une
meilleure gouvernance de notre pays.
Qu’avons-nous fait de notre héritage ? Comment avonsnous pu tomber si bas ? Comment se réveiller enfin ?
Mes chers compatriotes ;
C’est à ces différentes questions que nous avons entrepris
de trouver des réponses.
Durant ces cinq mois, nous avons essayé d’interroger notre
histoire. Quand on perd son chemin, il est sage de revenir à
Vous avez envoyé
ses racines. C’est ainsi que nous avons essayé d’impliquer
davantage les dépositaires de nos traditions et de nos
religions, gardiens de nos valeurs. De nombreux efforts ont
été déployés. La conjugaison de tous ces efforts a été
décisive pour créer un électrochoc nécessaire à notre réveil
collectif. Et les premiers signes de ce réveil commencent à
être perceptibles, aussi bien sur le plan de la réponse
militaire, que celui du dialogue : les deux piliers majeurs de
notre stratégie.
Plongées il y a quelques mois dans un état de
découragement et de démoralisation avancé, nos Forces se
sont remobilisées. L’intensification des actions offensives,
conduites souvent en coordination avec les VDP, ont visé
surtout à désorganiser le dispositif ennemi. Sur le plan
purement opérationnel, cet objectif-là, est atteint.
L’acquisition de nouveaux équipements et le renforcement
de nos capacités techniques, nous permettent aujourd’hui
de délivrer des feux avec une précision et un effet de
surprise que nous n’avions pas auparavant.
Dans une tentative désespérée de se réorganiser, les
terroristes procèdent désormais par groupuscules, misant
sur des actions d’éclat comme la destruction d’infrastructures, les menaces ou les attaques contre les
populations, pour maintenir l’illusion qu’ils gagnent du
terrain.
Les actions offensives évoquées ont été rendues possibles,
grâce à l’amélioration du dispositif de renseignement, plus
précis, plus réactif et plus flexible. Cela a considérablement
affiné les opérations de ciblage qui ont permis la
neutralisation de plusieurs chefs terroristes locaux.
Le dispositif mis en place pour assurer l’assistance aux
populations déplacées et aux populations vivant dans les
zones difficiles constitue également un point de satisfaction.
Malgré les difficultés liées au terrain, jamais les populations
n’ont été abandonnées à elles-mêmes.
En ce qui concerne la mise en œuvre du processus de
dialogue, les avancées enregistrées sont très significatives.
Elles sont même au-delà de ce qui était attendu. Grâce à
l’engagement des autorités religieuses, coutumières et
administratives, le programme de démobilisation est
aujourd’hui en marche. Plusieurs dizaines de jeunes ont déjà
accepté de saisir la main tendue des communautés, en
déposant les armes et en s’engageant dans le processus encadré par le Gouvernement.
Tous ces efforts combinés, ont permis d’observer une
relative accalmie dans plusieurs localités du Centre-nord, de
l’Est et du Nord. Localités auparavant régulièrement
éprouvées par les attaques terroristes. Certaines
populations commencent progressivement à regagner leurs
terroirs dans ces régions.
Il ne s’agit pas ici de s’autocongratuler sur les succès
engrangés car, nous en sommes conscients, la dynamique
est à peine en train de s’enclencher. Il faudra tout mettre en
œuvre pour la consolider et faire en sorte que le processus
devienne irréversible.
Burkinabè de l’intérieur et de la diaspora ;
La gravité de la situation interpelle notre conscience sur le
sacrifice individuel et collectif que nous devons consentir.
Cette situation nous impose en effet, au nom de la
sauvegarde de notre Nation, de prioriser nos actions, nos
décisions, nos besoins, nos loisirs et même nos libertés.
C’est le prix à payer pour inverser la tendance et saisir enfin
l’opportunité d’honorer notre histoire et de façonner notre
devenir. C’est pourquoi, nous allons mettre en œuvre toutes
les mesures nécessaires, pour d’abord reprendre le contrôle total de notre territoire et ensuite remettre notre pays sur
les rails du progrès. Il s’agira en effet de poursuivre et
d’intensifier les actions militaires, afin de réduire au
maximum les capacités de nuisance de l’ennemi. Les
nouveaux équipements militaires déjà acquis ou d’autres en
cours d’acquisition nous permettront de restreindre
davantage et de façon décisive la liberté de manœuvre des
groupes qui refusent toujours la main tendue de la Nation.
Le moral de nos troupes étant un facteur décisif de cette
guerre, les mesures concernant les conditions de vie et de
travail des Forces de Défense et de Sécurité, des Groupes
communaux de veille et de défense patriotique, seront
renforcées.
Cela s’accompagnera d’une réorganisation en profondeur de
notre dispositif opérationnel afin de mettre en place un
maillage territorial adapté à l’évolution de la menace. Cette
nouvelle structuration est déjà en cours de déploiement. Elle
permettra non seulement de répondre aux besoins
sécuritaires de proximité, mais facilitera également
l’appropriation par les communautés de leur propre sécurité.
Parallèlement, le dialogue initié à la base et qui produit déjà
des effets concrets, va être renforcé. Des personnes ressources et particulièrement influentes au sein des
communautés, se sont engagées formellement à s’impliquer
pour un retour des filles et des fils égarés. Au regard des
résultats auxquels nous sommes déjà parvenus, il s’avère
que cette initiative de tendre la main à nos frères est très
prometteuse. Je voudrais inviter tous les combattants des
groupes armés qui, par peur ou par méfiance, hésitent
encore à déposer les armes, à faire confiance à l’État et à
suivre l’exemple de leurs camarades d’hier qui ont eu le
courage de franchir le pas.
Sur le plan de la gouvernance, des réformes majeures
seront mises en route pour remettre l’administration
publique au service des administrés. Les réformes
concerneront également l’animation de la vie politique, qui
a aujourd’hui plus des allures anarchiques que d’espaces de
propositions pour un meilleur devenir de notre Nation. La
classe politique doit porter les espoirs de notre peuple et
constituer un exemple à suivre en termes de valeurs
patriotiques.
Sur le plan de la coopération, nous sommes très
reconnaissants aux pays amis du Burkina Faso, des efforts
faits à l’endroit de notre peuple en cette période décisive de son histoire. Notre mutation sera profonde tant au plan
politique, social, économique, culturel que diplomatique afin
d’asseoir définitivement les bases d’un Etat-nation stable et
prospère. Dans cet élan de changement audacieux et dans
l’intérêt supérieur de notre pays, nos alliances seront
portées vers des options qui garantissent le respect de notre
indépendance.
Chers compatriotes;
Certains d’entre vous, par émotion ou par impatience,
succombent rapidement à la tentation de tout remettre en
cause, lorsque survient un coup dur. D’autres par contre,
par ignorance ou par mauvaise foi manifeste, préfèrent ne
voir que les coups durs, jetant aux oubliettes les efforts de
nos Forces et ceux de nos vaillantes populations qui ont
permis à notre Nation de rester débout.
C’est le lieu pour moi, de saluer les énormes efforts
consentis par l’ensemble des Forces de Défense et de
Sécurité, ainsi que les Volontaires pour la Défense de la
Patrie, qui s’inscrivent sans réserve dans la logique offensive
imprimée par le Commandement des Opérations du Théâtre
National dans la conduite des activités de sécurisation de notre histoire.
Je réitère une fois encore ma compassion à l’endroit de
toutes les victimes, celles qui ont payé de leur vie, mais
aussi celles qui souffrent dans leur chair et dans leur dignité du fait du terrorisme.
Mes chers compatriotes;
L’histoire nous fait un clin d’œil aujourd’hui. Il y a 75 ans,
jour pour jour, le territoire de la Haute-Volta était
reconstitué après sa dissolution de 1932. En effet, le 4
septembre 1947 sonnait déjà comme un nouveau départ
pour le peuple fier de la Haute-Volta. L’espoir d’un avenir
radieux qui naissait grâce à de valeureux hommes qui, à
l’époque, avaient déjà compris que la Nation passait avant
tout.
Des devanciers comme le Mogho Naaba Koom 2, Hamadé
Bougouraoua OUEDRAOGO, Daniel Ouézzin COULIBALY,
Henri GUISSOU, Nazi BONI, le Mogho Naaba Sagha 2,
Gérard Kango OUEDRAOGO, Philippe Zinda KABORE et bien
d’autres, ont réussi ce sursaut patriotique qui nous permet
aujourd’hui d’exister en tant que Nation. Si ces hommes y
sont arrivés malgré l’adversité de l’époque, j’ai la ferme
conviction que nous aussi, nous pouvons y arriver.
C’est pourquoi, je voudrais vous inviter à ce même sursaut
patriotique. Marchons ensemble dans les pas de ces illustres
hommes. Comme eux, faisons de ce 4 septembre 2022 un
nouveau départ pour notre pays. Essayons ensemble de
dompter nos fragilités et de reconstruire notre vivreensemble. Faisons l’effort de retrouver nos valeurs.
Franchissons le pas pour oser reparler à l’autre, malgré la
douleur et les rancœurs. Il n’existe aucun autre chemin pour
enrayer l’engrenage de violences qui nous endeuille
quotidiennement. Tôt ou tard, il faudra emprunter ce
chemin.
Les divergences que nous trainons depuis des années, ne
nous ont causé que désolation. Il est temps de nous
redonner la main pour penser ensemble notre avenir. Ce qui
est en jeu, c’est notre survie. Ce qui est en jeu, c’est cette
Terre que nous avons reçue en héritage. La terre de Maurice
YAMEOGO, la terre de Aboubacar Sangoulé LAMIZANA, de
Saye ZERBO, de Jean-Baptiste OUEDRAOGO, de Thomas
SANKARA, de Blaise COMPAORE, de Yacouba Isaac ZIDA, de
Michel KAFANDO, de Roch Marc Christian KABORE.
Chers compatriotes;
Pour ma part, je me ferai le devoir de vous rendre compte
périodiquement de nos efforts communs de reconquête du
territoire national. Sur ce, je vous donne rendez-vous en début d’année 2023, pour un autre bilan de la dynamique
de reconquête de notre pays.
Que l’omnipotent et l’omniscient Dieu, nous inspire, afin que
la paix soit bientôt célébrée au Pays des hommes intègres.
Pour la Patrie, nous vaincrons !
Paul Henri Sandaogo DAMIBA
Président du Faso
Message à vide de sens pour ma part.
Seul la victoire sur le terrain va nous convaincre de l’efficacité de ta tactique de ré fondation durable.