Représentations artistiques en langues maternelles : Les RITLAMES II posent le débat pour commencer
Les Rencontres internationales de théâtre en langues maternelles, en abrégé les RITLAMES, sont un festival qui œuvre à la promotion et la valorisation des langues maternelles dans les représentations artistiques. Après une première édition réussie l’année dernière, le promoteur, Sidiki Yougbaré reboote avec l’acte II sous le thème : « Sooré » (langue nationale mooré) ou le chemin. Il est prévu, du 16 au 19 novembre 2022 à Ouagadougou des panels, des ateliers de transcription de textes en langues nationales, des lectures en langues nationales, des représentations théâtrales en langues nationales, des plateaux musicaux, etc. La cérémonie d’ouverture est intervenue ce matin à l’Université Joseph Ki-Zerbo. Et c’est autour d’un panel : « quel avenir pour nos langues maternelles africaines ? » que l’enseignante chercheur en littératures africaines, docteur Fatou Ghislaine Sanou et le metteur en scène, comédien et auteur, Paul Zoungrana ont enrichi le débat.
« Promouvoir le théâtre par le canal de nos langues maternelles », c’est l’objectif visé par les Rencontres internationales de théâtre en langues maternelles ou les RITLAMES. Il s’agit d’un festival initié par l’association Kala-Kala Théâtre en collaboration avec Les Plaisirs Chiffonnés, qui s’intéresse chaque année aux productions dramatiques (théâtres, textes, contes, etc.) en langues maternelles.
«… il n’y a pas assez d’auteurs dans le domaine du théâtre qui écrivent en langues nationales »
Selon le promoteur des RITLAMES, le comédien et metteur en scène, Sidiki Yougbaré, une telle initiative est partie d’un constat. « Je peux le dire sans craindre qu’il n’y a pas assez d’auteurs dans le domaine du théâtre qui écrivent en langues nationales », a-t-il soutenu. Il fallait de ce fait, indique-t-il y remédier en réfléchissant sur un cadre exclusivement dédié aux créations artistiques en langues maternelles.
Ainsi, durant les 96 heures d’activités de l’évènement, il est prévu des spectacles, des panels, des lectures de textes, etc. sur fond de langues maternelles. Déjà, le thème de la deuxième édition « Sooré » est en mooré, les interventions pendant la cérémonie d’ouverture l’étaient également.
Dans la même suite logique, un premier panel a été proposé, non pas en langues nationales cette fois-ci, mais plutôt pour réfléchir sur l’avenir des langues maternelles africaines. Ce sont l’enseignante chercheur en littératures africaines, docteur Fatou Ghislaine Sanou et le metteur en scène, comédien et auteur, Paul Zoungrana qui l’ont animé.
Qu’est-ce qu’une langue maternelle ?
La première citée est une universitaire. Elle s’est appesantie, dans son exposé, sur la perception des langues maternelles. « Généralement quand il s’agit de langue maternelle, il s’agit d’une langue apprise à la maison pour être concrète. C’est une langue apprise en premier lieu. Voilà pourquoi, j’ai l’habitude de dire qu’on ne dit pas langue paternelle, mais plutôt langue maternelle parce qu’on l’apprend dans le giron de la mère qui est plus proche de l’enfant à la naissance », a-t-elle expliqué. Et de soutenir qu’une langue maternelle est une langue par laquelle on s’identifie. Cette identification du locuteur, dit-elle, se fait à partir de l’environnement dans lequel il vit.
Dans la communication de l’enseignante chercheur, il faut également retenir que depuis la rencontre du 21 février 1999 des Nations-Unies, l’UNESCO a choisi de mettre désormais en valeur les langues maternelles. « Les Etats membres de l’UNESCO en décidant de célébrer les langues maternelles, ont voulu rappeler qu’elles constituent non seulement un élément essentiel du patrimoine culturel de l’humanité mais aussi l’expression inductible de la créativité humaine dans toute sa diversité », a rappelé la panéliste. Elle estime d’ailleurs que la prise en compte de la valorisation des langues parlées dans les différents territoires constitue aujourd’hui un enjeu culturel.
Le second panéliste, quant à lui est un praticien du 6e art. Paul Zoungrana, puisque c’est de lui qu’il s’agit, a orienté sa communication sur des exemples de créations théâtrales en langues maternelles, allant d’un rappel sommaire d’expériences vécues, à une contribution des uns et des autres dans la consolidation des créations qui mettent en valeur les langues nationales.
Pour illustrer ses propos, il a évoqué le théâtre de sensibilisation des troupes qui privilégie les langues nationales. Mais le souci, pour lui, c’est que, souvent les artistes créent des pièces dirigées ou commandées par des ONG. Il va sans doute se dire, à l’entendre que le travail de la langue à ce niveau n’est pas approfondi. Qu’à cela ne tienne, il affirme qu’il existe une prise de conscience certaine chez les uns quant à la création sur fond de langues nationales. « Il faut alors accentuer le travail sur la langue », a-t-il insisté.
C’est tout à fait l’avis du parrain de la 2e édition des RITLAMES, Toudeba Bobellé. « Si nous-même, nous ne valorisons pas nos langues, personne ne viendra le faire à notre place », a-t-il appuyé.
Un autre panel est encore prévu à l’amphithéâtre Bakary Coulibaly de l’Université Joseph Ki-Zerbo, le lendemain jeudi 17 novembre 2022 à 9 heures. Il sera aussi animé dans l’après-midi des ateliers de transcription, une soirée de conte, de musique, etc. à l’Espace culturel Gambidi.
Mais en attendant, rendez-vous tout à l’heure à l’Espace culture Gambidi, à 20 heures pour suivre la pièce théâtrale en mooré intitulée « Beoogo » lire aussi : https://kulturekibare.com/2022/10/28/spectacle-beoogo-le-fils-et-la-mere-sur-scene/ suivie d’un plateau musical.
Malick SAAGA
Kulture Kibaré