Lutte contre le terrorisme : Réponse militaire curative, réponse culturelle préventive

Lutte contre le terrorisme : Réponse militaire curative, réponse culturelle préventive

Le 4 avril 2022, le Premier ministre burkinabè, Albert Ouédraogo devant les représentants de l’Assemblée Législative de la Transition (ALT), a dévoilé la feuille de route de la Transition. Dans son exposé, le chef du Gouvernement a présenté quatre (4) axes stratégiques prioritaires. Il s’agit de lutter contre le terrorisme et restaurer l’intégrité du territoire ; répondre à la crise humanitaire ; refonder l’Etat et améliorer la gouvernance ; et enfin œuvrer à la réconciliation nationale et la cohésion sociale.

De mémoire d’homme, d’aussi loin qu’on s’en souvienne, le premier objectif de cette feuille de route n’est pas nouveau. Pour lutter contre le terrorisme et restaurer l’intégrité du territoire, il faut être encore plus stratégique. Il est judicieux de travailler en synergie d’actions. Laquelle synergie devrait impliquer impérativement le paramètre culturel, notamment le département de la culture, des arts, du tourisme, et désormais le département des affaires religieuses et coutumières. Il est quasi impossible d’évoquer la lutte contre le terrorisme tel qu’il se présente au Burkina Faso en occultant ces deux ministères.

A priori, toutes les élites politiques qui se sont succédé à la tête du Burkina Faso restent unanimes : la culture est le socle de développement d’un pays. Entendons par développement, la démarche globale mobilisant les acteurs et les ressources locales afin d’améliorer les conditions d’une évolution sociale. Le capitaine Thomas Sankara (parmi tant d’autres) l’avait si bien compris, et avait proclamé pour la première fois en 1985, un ministère plein de la culture, des arts et du tourisme afin d’avoir un regard particulier sur les questions culturelles.

Aujourd’hui, le défilé des Gouvernements successifs a vite laissé comprendre dans les actions que la culture est un complète-nombre d’où son statut perceptible de parent pauvre du budget de l’Etat. Cette appréhension pourtant erronée est, de notre conviction la cause d’un grand malaise social, d’une fragilisation ou encore d’un dysfonctionnement du tissu social et du vivre ensemble. Et c’est sur ce terrain que la radicalisation prend alors place.

Depuis 2016, le Burkina Faso subit une recrudescence des attaques terroristes. Malgré les interpellations multiples des uns et des autres, à se pencher véritablement sur la culture, comme arme indispensable pour prévenir l’extrémisme violent, rien ne fit. Soyons clairs, nous n’évoquons pas les chansons d’hommage aux Forces de Défense et de Sécurité (FDS). C’est bien plus sérieux que ça.

Une réflexion a été menée au Burkina Faso et dans l’espace UEMOA avec les ministères en charge de la culture des pays du G5 Sahel pour montrer la contribution de la culture à la prévention et à la lutte contre l’extrémisme violent.

Au cours de cette conférence des ministres, du 15 au 17 janvier 2020 à Ouagadougou, des éminentes personnalités culturelles venues du Mali, Mauritanie, Niger, Tchad et Burkina Faso, ont soutenu à l’unanimité que pour lutter efficacement contre le terrorisme, « il fallait une prise en compte effective des systèmes de valeurs culturelles pour construire un vivre ensemble harmonieux dans leur espace commun. Concrètement, il s’agissait de contribuer de manière constructive et progressive à tuer le mal par la racine à travers la promotion des valeurs culturelles  intrinsèques en vue d’engendrer de nouvelles formes de penser et de pensées », (extrait de l’édito de Kulture Kibaré du 20 décembre 2021).

Cette idée, loin d’être impertinente, consolide davantage les convictions d’Abdoul Karim Sango, ministre de la culture de l’époque et ses homologues de l’espace UEMOA, sur les récents évènements malheureux à Béguédo, dans le Centre-Est du Burkina Faso. Une jeunesse ou un peuple ayant intériorisé les valeurs culturelles de référence (le respect, la tolérance, l’hospitalité, la solidarité, la cohésion sociale, le vivre ensemble, le patriotisme, etc.) ne saurait s’armer contre ses propres frères. Puisqu’il a malheureusement été dit quelque part que ce sont des Burkinabè qui attaquent des Burkinabè. Il est évident que si les dirigeants politiques du G5 Sahel avaient prêté une oreille très attentive à ce colloque de Ouagadougou, avec une volonté affichée, nous ne serons pas dans cette situation sécuritaire, de plus en plus dégradante.

La réponse militaire au terrorisme est certes nécessaire et curative mais elle n’est pas du tout suffisante. La culture s’avère indispensable dans la prévention contre la radicalisation, l’extrémisme violent, et le terrorisme. Aussi puissante soit la riposte  de feu de l’armée burkinabè, tant que l’enrôlement  des groupes terroriste se poursuit dans les populations, nous sommes dans l’éternel recommencement dans cette la lutte.

En voulant « accélérer la mise en œuvre des projets et des programmes de développement territorial et de renforcement de la résilience des populations face à la radicalisation », Monsieur le chef du Gouvernement, Albert Ouédraogo il faut impérativement, placer la culture en ligne de mire. Et vos résultats seront probants. Car, au risque de nous répéter, la réponse militaire est curative et la réponse culturelle, préventive.

La Rédaction

CATEGORIES
MOTS-CLES
Partager

COMMENTAIRES

Wordpress (0)