Etalon d’or de Yennenga : Les raisons prévisibles du flop burkinabè
Les lampions se sont éteints sur la 27e édition du Festival panafricain du cinéma et de la télévision de Ouagadougou (FESPACO). L’Etalon d’Or de Yennenga, la plus prestigieuse distinction et la plus convoitée ne restera pas au pays des Hommes intègres. C’est du moins ce qu’a décidé le très « respectable » jury officiel du FESPACO 2021. Et le verdict est sans appel.
L’Etalon d’or de Yennenga est revenu au Finlandais d’origine somalienne Khadar Ahmed pour son premier long métrage « La femme du fossoyeur ». Ce film de 93 minutes raconte « le difficile équilibre d’une petite famille démunie de Djibouti à l’épreuve du système de santé fragile dans le pays. Nasra, l’épouse bien-aimée de Guled souffre d’une maladie rénale grave et doit se faire opérer d’urgence. Mais son revenu de fossoyeur ne lui permet pas de réunir les 5000 dollars nécessaires. Celui qui gagne sa vie grâce à la mort et a l’habitude de courir après les ambulances pour espérer avoir un corps à enterrer se voit maintenant, piégé dans une course contre la montre pour sauver la vie de sa femme et sa famille… ».
« La femme du fossoyeur » est suivi de « Freda » de la réalisatrice haïtienne, Gessica Geneus qui remporte l’Etalon d’argent, fiction long métrage et de « Une histoire d’amour et de désir » de la tunisienne Leyla Bouzid qui repart avec l’Etalon de bronze.
Comme on le voit, le Burkina Faso ne fait pas partie du trio gagnant pour la énième fois. Le flop du pays de Thomas Sankara à travers « Les trois lascars », seul film burkinabè qui était en compétition pour l’Etalon d’Or, était assez prévisible.
Malgré un casting sous-régional affiché, le film de Boubacar Diallo, en dehors d’un prix spécial, n’a pas été à la hauteur des yeux du jury pour succéder à Tilaï (1991) du maestro feu Idrissa Ouédraogo et de Buud-Yam (1997) de Gaston Kaboré. Maigre consolation cependant, outre les prix spéciaux, pour le Burkina Faso avec « Garderie Nocturne » de Moumouni Sanou qui a remporté l’Etalon d’or dans la catégorie documentaire long métrage et « Zalissa » de Carine Bado qui a empoigné le poulain de bronze fiction court métrage…
Le Burkina Faso a donc échoué dans la plus grande des catégories, « Fiction long métrage ». Qu’est ce qui n’a pas marché ? Une des raisons et sans doute la principale est la qualité et les compétences professionnelles de certains de nos réalisateurs, scénaristes et acteurs actuels. On viendrait à penser qu’ils ne sont pas à la hauteur des nouvelles mutations du 7e art au plan continental et même international. Il faut pourtant rentrer dans la nouvelle donne cinématographique.
Dit autrement, aucun film burkinabè à l’eau de rose ou tournant autour des thèmes d’amour aussi superficiels ne pourra remporter l’Etalon d’Or de Yennenga. Une remise en cause s’avère si nécessaire. Car, l’Etat aura beau investir des tonnes de milliards F CFA dans notre cinéma, cela ne résoudra pas les broutilles de notre 7e art. Il nous faut par conséquent sortir des sentiers battus et observer ce qui marche chez les autres. Il faut s’en inspirer (et non copier).
Au FESPACO, tout comme aux quatre coins du monde, il existe une formule presque magique pour remporter des prix ou se voir ouvrir des portes à l’international. Il s’agit indéniablement du thème du drame. Il marche bien selon notre constat. Pour s’en convaincre, il suffit de regarder « Tey », « Félicité » de Alain Gomis, « The mercy of the jungle » de Joël Karekezi, le dernier Etalon de Yennenga.
Ou pour rendre plus simple, les choses revenons chez nous à Tilaï et à Buud Yam. Ces films, y compris « La femme du fossoyeur », mettent en exergue le drame que vivent des individus ou vit un individu. Et Boubacar Diallo n’est pas parvenu à faire vivre un drame à ces « Les trois lascars ». Au contraire, ces trois personnages volages devaient faire face à la revanche de leurs épouses respectives… Drôle non !
Il revient aux autres réalisateurs burkinabè prétendant à un Etalon d’or de Yennenga, les prochaines éditions du FESPACO de tirer toutes les conséquences de cette déculottée. Car, comme le dit si bien une boutade, « la folie c’est de continuer à faire toujours la même chose et de s’attendre à un résultat différent ».
La Rédaction