Disc-jockey (DJ) burkinabè : Créateur ou utilisateur de musique ?
Le Disc-Jockey (DJ) est une personne qui fait tourner les platines pendant les soirées pour y mettre de l'ambiance. On les appelle aussi, sous d'autres cieux, des platinistes.
Des boîtes de nuit aux bars en passant par les maquis, il n’est pas rare d’y rencontrer de jeunes se revendiquant DJ. Ils développent et préparent une programmation adaptée à un public, maîtrisent les techniques du mixage, les logiciels de musique assistée par ordinateur (MAO) et interviennent au micro en tant qu’animateurs.
Mais, cela fait-il pour autant deux, des musiciens, donc des créateurs d’œuvre de l’esprit ? A ce titre peuvent-ils prétendre à des droits d’auteur ?
De prime abord, la réponse à ces interrogations est un « non » sans équivoque. Car, se contenter de diffuser, tout au long de la soirée, les différentes chansons d’artistes d’ici et d’ailleurs ne fait pas d’un DJ, un artiste ou un auteur au sens plein du terme.
Au contraire, la diffusion de musique dans un lieu public, c’est-à-dire en dehors du cadre privé, est soumise à une autorisation et à un paiement d’une redevance de droit d’auteur que bénéficiera le créateur (auteur, compositeur, interprète et autres intervenants).
Le DJ, tel que perçu au Burkina Faso (d’aucuns diront simplement l’animateur) n’est pas exempté de cette obligation. Puisqu’il s’affiche comme un utilisateur d’œuvres. Il devrait en principe s’acquitter des droits sur les titres diffusés ou joués dans les maquis et boîtes de nuit.
Nos DJ s’acquittent-ils de cette obligation en reversant au Bureau Burkinabè du Droit d’Auteur (BBDA) des redevances ? Non, puisque la plupart sont des employés des espaces récréatifs qui reversent déjà la redevance du droit d’auteur au BBDA. Cependant, contrairement au Burkina Faso où les limites de cette profession sont caractérisées par un flou artistique, il existe en France une réglementation précise sur le statut de DJ et les conditions pour exercer le métier ou tout simplement pour se revendiquer artiste.
Mieux, l’on y a opéré un distinguo net entre animation musicale (ce qui est le plus courant au Burkina Faso et dans la sous-région) et édition ou production musicale (le DJ crée ses propres morceaux). Pour ce second cas, l’on retrouve, entre autres, des DJ de renom tels David Guetta, Martin Solveig ou les Daft Punk, mais qui sont des auteurs.
Plusieurs d’entre eux sont d’ailleurs passés par une école de formation. Et, il en existe à la pelle à savoir EANOV School, DJ Network, les centres de formation professionnelle de la musique (CFPM), etc. à travers la France (Paris, Nantes, Lyon, Montpellier, Cannes, Lille, etc.). Au Burkina Faso, nous devrions peut-être nous en inspirer…
En ce qui concerne le droit d’auteur, un DJ peut devenir membre du BBDA à condition, comme nous l’avons relevé, qu’il compose ses propres titres et les protège par des droits d’auteur.
Autrement dit, s’il est compositeur et que ses œuvres sont diffusées ou utilisées, il doit naturellement percevoir des droits. L’autre possibilité qui se présente serait, par exemple, pour le BBDA de créer un statut de « DJ remixeur ».
C’est du moins ce qu’a fait la Société des auteurs, compositeurs et éditeurs de musique (SACEM) qui est une société française de gestion collective des droits d’auteur en musique. S’il remixe des titres en direct, le DJ remixeur, en France, a le droit de toucher des droits d’auteurs sur les arrangements qu’il a apportés. Mais, il faudra, auparavant et obligatoirement cotiser et payer des charges (pourcentage retenu sur les bénéfices fait par le DJ artiste auteur).
Il y a une nécessité de bien structurer la sphère des « DJ » burkinabè afin que sa prise en compte dans les répartitions du droit d’auteur ne soit pas entachée d’amalgame et d’imposture. C’est maintenant que le vrai débat doit se poser, car nos DJ burkinabè ne sont pas des artistes auteurs. Ce sont des animateurs.
La Rédaction