Correction de la statue de Thomas Sankara : « L’œuvre avait atteint le niveau maximum de ressemblance »

Correction de la statue de Thomas Sankara : « L’œuvre avait atteint le niveau maximum de ressemblance »

La réalisation de la statue de Thomas Sankara avait provoqué un tollé du fait de quelques traits distinctifs physiques du visage qui ne correspondraient pas au leader de la révolution d’août 83. Fixée de nouveau, à la même place pour la troisième fois, elle sera découverte au plus tard le 15 février 2020, selon le Secrétaire permanent du CIM-TS, Lianhoué Ihmotep Bayala. Comme par pure coïncidence, le monument élevé à l’honneur du Capitaine Thomas Sankara, refait surface, juste après la sortie du livre « Ma part de vérité » de Jean-Baptiste Ouédraogo qui tend à déconstruire le mythe Sankara. Est-ce une réplique du CIM-TS à l’auteur ? Quelle appréciation le comité fait-il des corrections ?  Nous avons rencontré donc le Secrétaire permanent du Comité International Thomas Sankara (CIM-TS), pour mieux comprendre.

Kulture Kibaré : La statue corrigée de Thomas Sankara a été fixée de nouveau juste après la présentation du livre « Ma part de vérité » de Jean-Baptiste Ouédraogo. Est-ce qu’il y a un rapport ?

Lianhoué Imohtep Bayala : C’est une coïncidence voulue par la nature qui refuse l’imposture du mensonge, de la haine, de la jalousie et de la méchanceté. Rien n’avait préparé à une telle coïncidence, pas de notre côté en tout cas. Je pense que rien n’arrive au hasard. Il se trouvait que le triste livre, « Ma part de vérité » de monsieur Jean-Baptiste sortait, il se trouvait aussi que l’artiste avait fini tout ce qui était travail artistique sur la statue. Aussi, on avait eu les différents avis des différents cercles d’accréditation ou de validation de la statue réfectionnée, que ce soit le pouvoir local ici, le personnage d’honneur John Jerry Rawlings, le ministère de la Culture. Il se trouvait que tous ces avis qui étaient nécessaires à la validation de la statue corrigée avaient été obtenus. Nous avons acté l’idée de déposer la statue et de procéder à son dévoilement au plus tard le 15 février. Il se trouvait qu’un livre serait sorti pour faire l’apologie de la décente aux enfers de Sankara et en ce moment renaissait sur l’espace où il est mort, une statue pour renoncer à sa mort.

Kulture Kibaré : Alors qu’est-ce qui a été réellement retouché dans la statue ?

Lianhoué Imohtep Bayala : Le corps dans son ensemble a été de nouveau retouché pour préciser tous les traits et sortir une œuvre très esthétique. La plus grande tâche a été faite et opérée au niveau de la tête. Il s’est agi à un moment donné, d’abandonner complètement la première tête qui avait été faite. Elle a été décapitée. Et de remouler une autre tête par des processus beaucoup plus exigeants en passant par l’argile en premier lieu, ensuite la cire et enfin le bronze pour s’assurer que finalement, on aurait une tête de Sankara qui se rapproche et qui rapproche de lui-même. Donc, c’est la tête qui a été substantiellement touchée notamment la face, parce que la statue de profil, vous vous souvenez que nous avons voulu un premier dévoilement en octobre et là, malheureusement la face avait encore des traits qui étaient absents pour caractériser l’image exacte de l’homme. Pour la troisième phase de de correction et qui est la dernière, c’était de toucher substantiellement les traits du visage vus de face.

Lianhoué Imohtep Bayala        

Kulture Kibaré : En tant que membre du Comité International  Mémorial Thomas Sankara, vous avez dû constater  les corrections faites.  Est-ce que vous êtes satisfaits des réajustements ?

Lianhoué Imohtep Bayala : Oui, si on n’était pas satisfait, on n’allait pas donner quitus à l’artiste de venir placer la statue, ce d’autant plus que la première erreur qu’on avait fait au niveau du comité, c’était de n’avoir pas fait le suivi, dont on a fait actuellement et que la statue nous a rejoint au même titre que le public sur la place. Nous apprenons de nos erreurs et nous avons de façon quotidienne  et journalière fait un processus d’observation et de suivi permanent au pied de l’artiste. C’est au regard, à la fin, à la suite d’une telle réalité de rigueur que nous avons trouvée qu’en ce moment très précis l’œuvre avait atteint le niveau maximum de ressemblance. Elle n’est pas parfaite parce que c’est une œuvre, Elle ne sera pas idéale parce que c’est une œuvre. Mais à ce jour, au niveau du comité qui a suivi au quotidien la réfection, nous avons jugé qu’elle était recevable. C’est ce pourquoi, on a engagé son redéploiement sur le site.

Kulture Kibaré : Ne craignez-vous pas d’une réaction antipathique du grand public après l’inauguration ?

Lianhoué Imohtep Bayala : Déjà les avis sont partagés à partir du moment où beaucoup l’ont vue réapparaître sur le site. C’est encore emballé mais quand vous lisez les réactions, vous comprenez qu’il y a une part de nos citoyens qui sont motivés et enthousiasmés de revoir Sankara renaître au moment où même des vieux qui manquent d’une certaine sagesse se déploient à le descendre. Pour une certaine opinion, largement, c’est une très grande aubaine et cette œuvre était attendue à sa place. Pour une autre dont il faut en avoir la conscience, à commencer à s’attaquer la venue sur l’espace de la statue. Les propos vont du fait que même emballé dans du plastique, d’autres disent que Sankara aurait un gros ventre et d’autres disent, il est plus grand. Donc vous voyez par-là, que la nature des critiques tend à montrer que même si on ressuscite Sankara pour le replacer, il n’y aurait pas unanimité autour de lui. Mais ce que nous recherchons au niveau du comité, c’est de nous rapprocher du maximum de perfection. Nous pensons qu’à ce jour, nous avons atteint le maximum.         

Kulture Kibaré : Dites, à combien s’élèvent les pertes et les charges supplémentaires supportées dans la correction de la statue ?

Lianhoué Imohtep Bayala : Malheureusement, je n’ai aucune idée par rapport à ça. Parce que les aspects techniques concernent le ministère de la Culture. C’est elle qui a commandé l’œuvre. Ça n’a pas été manipulé par le mémorial. Je pense que le service des marchés publics et la DAF du ministère de la Culture sont très indiqués non seulement pour vous donner les éléments d’information y réfèrent mais surtout les plus indiqués pour vous donner des précisions sur la nature des dépenses et du coût supplémentaire supporté. En tant que bénéficiaires, nous n’avons aucune information.

Kulture Kibaré : Quel est en ce moment votre cri de cœur ?

Lianhoué Imohtep Bayala : Notre cri de cœur, c’est un redéploiement, de tout le peuple burkinabè, de tous les héritiers à travers leur terre pour se rendre compte que Sankara n’était pas un Dieu mais il était proche de Dieu. C’est de dire que Sankara doit demeurer la figure inspirante et que pour cela, il faut véritablement faire en sorte qu’en plus de sa renaissance sur l’espace, de jour en jour, on constate que dans le quotidien des Burkinabè et de ceux qui se revendiquent de Sankara, qu’ils ont des actes et des paroles qui se rapprochent de lui. Je pense que c’est fondamental, sinon, un mémorial sonnerait de trop dans un monde où la volonté de se décaler par les actes de Sankara le rendrait doublement mort, injustice. Mon cri de cœur, c’est de dire à tous ces gens qui pensent que Sankara est la référence de veiller à ce qu’il y ait du Sankara dans leurs pensées, dans leurs paroles et dans leurs actes. Ça va accélérer le processus d’apaisement de l’homme lui-même. Le dernier élément, c’est surtout à l’adresse des gouvernants, c’est de dire que, jamais dans l’histoire politique du Burkina Faso, de l’Afrique en général, nous n’avons eu un projet d’une telle ambition. Des mémoriaux, il existe à travers l’Afrique mais là, nous avons un projet conséquemment ambitieux pour faire un lien strict entre le Sankara visionnaire qui voulait faire venir la mer au Burkina Faso et le Sankara modeste. Il y a une nuance fondamentale et les gens font une confusion entre Sankara qui était modeste qui roulait des Peugeot mais qui avait une vision à faire aller le Burkina Faso sur la planète Mars. Donc pour nous, il faut que le Gouvernement comprenne que là, on a quelque chose de fondamental pour notre monde, pour 100 ans, pour 200 ans. Il ne faut pas lésiner le courage politique à accompagner cette initiative parce que désormais on aura pour la ville de Ouagadougou un projet révolutionnaire qui va changer la stature de la ville de Ouagadougou en terme d’attraction touristique mais aussi du Burkina Faso, c’est un projet ambitieux et d’avenir dans lequel l’Etat doit construire et bâtir une nation géante.

Propos recueillis par Malick SAAGA

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