Loi «1%artistisque» : A quand sa mise en application ?
La culture contribue, selon les conclusions d’une enquête menée en 2008 par l’Institut national de la statistique et démographie (INSD), à près de 4 % (3,93) du Produit intérieur brut (PIB) du Burkina Faso.
En 2009, la valeur ajoutée par les filières culturelles était estimée à 79,667 milliards de Francs CFA, soit 2,02% du PIB. Aussi, les activités culturelles au Burkina Faso emploient un nombre relativement important de personnes.
A la même époque, 164 592 personnes représentant 1,78% des actifs occupaient un emploi dans le domaine de la culture. (Cf. Etude sur les impacts de la culture sur le développement social et économique au Burkina, 2009).
Le potentiel économique du secteur de la culture au Burkina Faso, comme on le voit, est indéniable. C’est, sans doute, conscient de ce levier de développement que le Gouvernement a, entre autres initiatives, mis en place, en 2012, un mécanisme de commande publique d’œuvres d’art pour la décoration des édifices publics. Trois années plus tard, cet élan de valorisation de la culture burkinabè, par ricochet de soutien aux artistes plasticiens deviendra, sous la Transition, l’une des recommandations des «Voies du renouveau» proposées par le rapport de la Commission de réconciliation nationale, et des réformes (CRNR). Le gouvernement, en décembre 2016, sous le ministre de la Culture d’alors, Tahirou Barry, acquerra au profit de la décoration, des édifices publics de 180 œuvres d’art d’une valeur de plus de 100 millions de F CFA. Malheureusement, cette initiative audacieuse ne sera pas poursuivie et ce, malgré la salutaire adoption, en mai 2017 par l’Assemblée nationale, de la loi communément appelée «1% artistique».
La loi «1% artistique» est une procédure spécifique de commande d’œuvres à des artistes qui s’impose à l’État, à ses établissements publics et aux collectivités territoriales. Elle consiste à consacrer 1% du coût total des travaux de construction, d’extension ou de réhabilitation des bâtiments publics (lorsque le coût total des travaux hors taxes est supérieur ou égal à 50 millions de F CFA) ou à l’achat d’une ou plusieurs œuvres d’art originales destinées à être intégrées dans l’ouvrage ou ses abords.
Entrent également dans cette quote-part du «1% artistique», les bureaux des responsables administratifs, les projets d’aménagements des sites et zones à vocation culturelle et/ou touristique, de réalisations ou de développements d’infrastructures culturelles ou touristiques. Que retenir deux ans après l’adoption de cette la loi du «1% artistique», pourtant expression d’une volonté politique de soutenir la création et de susciter chez les Burkinabè le goût pour les œuvres d’art ?
Le constat sur le terrain est sans équivoque. L’application de la loi « 1% artistique » agonise dans un tiroir, tandis que les œuvres plastiques et autres sculptures de nos artistes plasticiens «chôment » dans les ateliers, en attendant un hypothétique preneur. Comme certaines des lois adoptées au pays des Hommes intègres, la loi «1% artistique» a, sans doute, été rangée aux oubliettes.
C’est du moins le sentiment de la Fédération des filières des arts plastiques et appliqués du Burkina Faso (FEFAPA/BF). Elle a notamment fait part de son inquiétude à travers ses membres tout dernièrement, le vendredi 13 décembre dernier, lors d’une conférence de presse. La loi «1% artistique» doit donc être ressorti du placard pour le bien de notre économie nationale, et surtout des acteurs du secteur et leurs familles. Toutefois, de nombreuses questions doivent trouver au préalable des réponses précises.
Quelle sera la structure habilitée à recevoir l’ensemble des sommes provenant des différents achats? Comment sera-t-il reparti entre les acteurs? Comment se fera le choix des œuvres? Et sur la base de quels critères ? Combien d’artistes plasticiens compte le Burkina Faso? Qui peut revendiquer le statut d’artiste plasticien ?
Ignorer ces interrogations, c’est se retrouver en face d’un dilemme cornélien : l’application effective ou non de la loi de « 1% artistique » posera toujours problème. Aux autorités, notamment celles du ministère de la Culture, des Arts et du Tourisme de prendre dès à présent le taureau par les cornes, donc toutes les prédispositions pour garantir toute transparence après sa mise en application effective. A bon auditeur, salut !
La Rédaction